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Page:Leo - Une vieille fille.pdf/84

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Ils marchaient silencieux, recueillis chacun dans sa pensée ; mais la nature, mère de l’homme, a le pouvoir d’ouvrir les cœurs et de délier les voix, et, parvenus sur le bord du torrent, ils mirent en commun leur admiration. Au fond de cet abîme touffu où de grandes plaques d’ombre succédaient brusquement à des nappes de lumière, ils ne voyaient, hors les arbres, que le ciel, quand tout à coup, au tournant d’une gorge, une fantastique apparition, qu’ils saluèrent d’un cri, surgit à leurs yeux. C’était le sommet de la Dent d’Oche, dont le blanc dôme semblait poser sur la cime des bois. Ils sortirent de la vallée par le côté du midi et gagnèrent, au bord du lac, le village de Pully d’où ils remontèrent à Lausanne.

Malgré la beauté de la soirée, la fin de cette promenade fut assez triste. Mademoiselle Dubois avait repris son ton habituel ; mais, en se rappelant l’émotion si vive qu’elle avait montrée, Albert soupçonnait en elle un chagrin secret et