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Page:Leprohon - Antoinette de Mirecourt ou Mariage secret et chagrins cachés, 1881.djvu/125

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— Mon père ! s’écria Antoinette en devenant pâle comme an marbre.

— Oui, c’est lui ! dit à son tour Lucille qui venait de pousser une reconnaissance vers la fenêtre. Qui l’aurait attendu par de pareils chemins ?… Et maintenant, chère enfant, pas de folles terreurs, pas de tremblements nerveux ! Si, par malheur, ton père n’est pas d’une humeur favorable, garde-toi bien de lui annoncer ton mariage à présent : la précipitation gâterait tout.

Quelques instants après, M. de Mirecourt — un homme de bonne apparence appartenant à la vieille école française, — entrait ; et sa fille, pour éviter son regard pénétrant se jeta aussitôt dans ses bras. Il l’embrassa avec effusion, puis prenant sa tête à deux mains, et la regardant minutieusement :

— Je l’avais bien pensé, petite, s’écria-t-il ; mes craintes n’étaient pas veines. Cette vie du grand monde, si gaie, si brillante, si animée, n’est pas faite pour une enfant de la campagne comme toi. Quoi ! tu sembles avoir vieilli de trois ans depuis que tu m’as quitté ! Tes joues, il est vrai, sont encore vermeilles, mais ces petites mains brûlantes indiquent que leurs couleurs sont plutôt celles de la fièvre que de la santé.

— Antoinette n’a pas bien dormi la nuit dernière, cher oncle, se hâta de dire madame d’Aulnay qui se tenait derrière lui, la main appuyée sur son épaule. Elle est extraordinairement nerveuse !