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Page:Leprohon - Antoinette de Mirecourt ou Mariage secret et chagrins cachés, 1881.djvu/254

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Trop abattue pour pouvoir répliquer à cette amère raillerie, Antoinette se cacha le visage dans ses mains.

Écoute moi bien, Antoinette, continua-t-il en changeant tout-à-coup de ton et de manières. Tu me trouves aussi sévère et aussi sombre parce que, de ton côté, tu ne m’as montré que peu d’amour et de sympathie. Dis moi que tu oublies le passé, et, comme garantie de ma conduite à venir, laisse moi embrasser ce front orgueilleux qui s’y est jusqu’ici opposé avec tant de dédain. Ne me refuse pas, car, je te le répète, il est dangereux de pousser si loin un homme désespéré.

N’osant pas, ou croyant qu’elle ne pouvait pas lui refuser cette petite concession, elle ne répondit pas. Interprétant favorablement ce silence, il passa son bras autour d’elle, et embrassa plusieurs fois son front et sa soyeuse chevelure.

Tout-à-coup une exclamation de saisissement et de douleur brisa le silence qui s’était établi,et Antoinette, se dégageant brusquement des bras qui l’entouraient aperçut le colonel Evelyn qui, pâle comme la mort, se tenait sur le seuil de la chambre. Une seconde après, il s’était effacé ; et comme Antoinette laissait tomber un regard de reproche sur son mari, elle vit sur la figure de celui-ci un sourire de triomphe moqueur qui avait remplacé la tendresse qui s’y était un instant reposée.

— Je crois, dit-il d’une voix railleuse, que le super-