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Page:Leroux - Balaoo, 1912.djvu/24

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BALAOO

matelas qu’on lui avait jeté sur le billard ; quand ils furent couchés tous deux, la conversation s’engagea :

— Comment n’êtes-vous pas allé coucher chez votre oncle ? demandait Blondel.

— J’ai frappé à sa porte et j’ai appelé. Tout le monde dormait déjà, bien sûr ! je n’ai pas voulu les réveiller.

— Mademoiselle Madeleine va bien ?

— Mais je l’espère, merci.

— C’est pour quand les noces ?

— Vous le demanderez à mon oncle.

Blondel comprit qu’il avait été indiscret. Il changea de sujet et ils arrivèrent tout de suite à parler de l’attentat et des derniers crimes que le commis-voyageur mettait carrément sur le dos des frères Vautrin.

— Oh ! fit Patrice, à Clermont-Ferrand, comme ici, on est bien d’avis qu’on ne peut pas tout expliquer avec les Trois Frères.

— Avec les Trois Frères et la sœur on explique tout, fit le commis-voyageur.

— Ce qui est tout à fait incroyable, insista Patrice, c’est qu’on n’ait trouvé aucune trace des assassins, pas plus chez Camus que chez Lombard.

— Possible, mais il y a une chose certaine, répliqua l’autre : c’est que, si Camus et Lombard n’avaient pas ouvert leur porte la nuit où on les a assassinés, quand ils ont entendu dans la rue des gémissements et la voix de cette petite sauvage de Zoé… ils vivraient encore. C’est la sœur qui les a attirés…

À ce moment, les deux hommes se turent d’un subit accord. Et ils se dressèrent sur leur séant, l’oreille aux écoutes. Des gémissements venaient de la rue.