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Page:Leroux - Balaoo, 1912.djvu/74

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BALAOO

qui avait quelques raisons d’être fortement préoccupé : d’abord la terrible aventure de la nuit précédente, et puis les brutales hypothèses du juge d’instruction qui lui revenaient à chaque instant à l’esprit, en dépit des arguments de Coriolis et de Madeleine… Enfin, quelque chose qu’il ; n’eût pu définir exactement et qui lui venait du mécontentement de sa journée.

C’était la vérité qu’il n’était content de personne ici, ni de l’oncle, ni de Gertrude, ni surtout de Madeleine. Selon son idée, après les affreux dangers qu’il avait courus, il eût dû être l’objet constant et unique des préoccupations de sa fiancée.

Or, Madeleine était comme les autres qui semblaient, tout le temps, penser à autre chose.

Ce n’était point la première fois qu’il avait, au bout de quelques heures passées au manoir, cette sensation singulière, que ses habitants pensaient continuellement à une chose dont il ne soupçonnait même pas la nature ; mais jamais cette sensation n’avait été aussi aiguë, ni aussi douloureuse.

Ainsi songeait-il à sa fenêtre, quand tout à coup, il retint son souffle. Il venait d’apercevoir au long du mur, glissant rapidement dans l’ombre des communs, une forme si légère que sa course ne faisait aucun bruit. Il avait un battement de cœur tel qu’il crut encore qu’il allait défaillir. Il se maintint cependant, rejeté dans le coin de la fenêtre, invisible. La forme avait disparu sous la voûte du cellier, et il perçut très nettement la voix de Zoé qui appelait doucement : Mademoiselle !

La voix de Madeleine répondit aussitôt.

Alors il y eut, dans l’ombre du cellier, un singulier dialogue que Patrice, de l’endroit où il se trouvait, put