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Page:Leroux - Le fils de trois pères, Baudinière, 1926.djvu/11

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poule ou électrique se voilait d’un petit abat-jour de soie rose, garni de perles multicolores. Comment ne pas répondre à une pareille invite ? Cette chambre semblait attendre son locataire. On pouvait imaginer que Hardigras, en se mêlant dans la journée au flot des clients, avait résolu de ne pas la faire attendre plus longtemps… Et, la nuit venue, après que les vendeurs eurent recouvert les meubles de leurs lustrines grises, l’hôte indésirable de la « Bella Nissa » avait pris possession de son appartement…

Sans craindre la ronde des veilleurs de nuit, Hardigras, entre ses draps et sous le couvert de la lustrine, avait dû faire de beaux rêves !… Puis il s’était levé de bonne heure, s’était senti « en appétit », était allé aux provisions… on avait pu reconstituer, grâce à la disparition de quelques denrées ou condiments, les éléments de son petit déjeuner du matin.

Par la même occasion, Hardigras avait monté sa batterie de cuisine : casseroles, réchaud à essence, il ne manquait de rien !

Un autre jour, il avait travaillé pour sa garde-robe. Négligeant les smokings et habits de soirée, il s’était muni de quelques complets qui eussent fait le bonheur d’une demi-douzaine de braves compagnons s’apprêtant galamment à aller faire tourner les filles aux festins du dimanche ou à « faire cougourdon » à Cimiez, en mangeant « la tourta de blea ».

En choisissant des effets de tailles différentes, peut-être avait-il voulu faire croire à des complices, mais plus simplement avait-il ainsi dissimulé la sienne, ce qui prouvait qu’il ne manquait point de bon sens.