Page:Leroux - Le fils de trois pères, Baudinière, 1926.djvu/231

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vue autant que le goût, enfin mettre le ventre et la tête en joie.

Tout cela coûtait cher et il arriva vite le jour où Gamba Secca lui annonça que la caisse des « kiosques du Bastardon » était vide.

Alors Titin redevint triste et licencia tous ses modèles.

C’est dans un de ces moments où il étalait assez mélancoliquement du bleu d’outremer sur sa ligne d’horizon qu’il s’entendit interpeller par une voix musicale au timbre inconnu qui demandait si l’artiste qui était en train de peindre n’était point le grand, l’illoustre Titin-le-Bastardon.

Titin se retourna et se trouva en présence d’un homme vêtu avec la plus grande élégance qui se courbait jusqu’à terre et ne se relevait que pour lui parler de son dévouement sans bornes, de sa fidélité à toute épreuve et de son incommensurable admiration.

— Mais monsieur ! Vous devez vous tromper, finit par prononcer Titin en fronçant les sourcils, car il n’était point d’humeur à laisser un inconnu se gausser de lui.

— Non ! Non ! Zé né mé trompé pas !… Par la vierge Marie et les saints archanges, par tout ce que z’ai de plous cer au monde… jé souis lé plus humble dé vos serviteurs, monsieur Titin… C’est bien vous, n’est-ce pas qui avez envoyé cette lettre au prince Marie-Hippothadée de Transalbanie ?

— Oui ! Et après ? fit Titin sur ses gardes.

— Et après, monsiou Titin ? Son Altesse, touchée par votre lettre que z’ai loue, et qui était soublime !…