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Page:Leroux - Les Étranges Noces de Rouletabille, 1918.djvu/366

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LES ÉTRANGES NOCES

l’horrible tête qu’elle avait sortie du coffret byzantin !

Rouletabille la câlinait, essayait de la réchauffer, de l’attendrir, espérait des larmes qui l’eussent peut-être soulagée et épuisait toutes les ressources de sa dialectique à démolir le monument d’épouvante qu’Ivana dressait sur le seuil de leur bonheur…

Pour lui, osait-il affirmer avec une audace incomparable, cette tête avait été envoyée par un ami de la famille Vilitchkof qui savait avec quelle joie, le jour de son mariage, Ivana apprendrait ainsi que ses malheureux parents avaient été vengés… C’étaient là des cadeaux assez ordinaires qui se faisaient en Bulgarie…

— Et moi, répondait-elle, sans que cessât cet affreux tremblement nerveux qui l’avait prise devant la tête de Gaulow, et moi, je te dis que c’est Athanase qui nous poursuit par delà la tombe… À moins, à moins encore qu’Athanase ne soit pas mort !…

— Tu as entendu La Candeur, Ivana… Tondor l’accompagnait… Tous deux ont vu son cadavre troué de balles…

— Troué de balles ! c’est affreux !… et puis on dit ça !… on croit ça !… Des balles ! Mais cette guerre a vu des corps percés de cinquante balles et que l’on a crus morts cinquante fois et qui vivent !… qui vivent ! Athanase n’est pas mort !… et il va venir me réclamer !… Mais tu me garderas, dis, petit Zo ?… tu me garderas !…

Elle éclata en sanglots, cependant que ses bras nerveux étreignaient le pauvre jeune homme dont le vi-