Aller au contenu

Page:Leroux - Les Étranges Noces de Rouletabille, 1918.djvu/53

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

DE ROULETABILLE
49

dit aux bachi-bouzouks !… Allons, soyons raisonnables et mangeons !…

— Nous allons manger, répondit Athanase, mais nous attendons encore un convive,

— Qui ?

— Regarde là-bas, celui qui s’avance vers le pont…

— C’est un vieux mendiant qui n’est pas du pays, je ne le connais pas…

— Si… si… tu le connais… mais il revient de si loin… de si loin… Heureusement que je l’ai trouvé sur ma route, sans quoi il n’eût point retrouvé son chemin… et je l’ai invité pour ce soir, persuadé que nulle rencontre ne te serait aussi agréable, vieux Dotchov !…

— Sur la sainte Vierge, je ne le reconnais pas… Dis-lui qu’il approche.

Alors Athanase s’en va chercher le mendiant et le ramène par la main, jusqu’au vieux pont du pré aux porchers. Certainement, au fond des prisons d’Anatolie, le mendiant avait pensé ne plus le revoir, ce pont mémorable, fait de deux planches et d’une traverse pourrie. Par la main, Athanase amène donc le vieillard en haillons devant l’aimable et vénéré Dotchov, qui cligne des yeux :

— Non, non, je ne le reconnais pas !

— Tu ne reconnais pas le bon Cyrille, célèbre pour ses malheurs ?

Dotchov, à ces mots, se leva terriblement pâle ;