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Page:Leroux - Les Étranges Noces de Rouletabille, 1918.djvu/94

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LES ÉTRANGES NOCES

letabille constata même qu’elle se bouchait les oreilles pour ne pas entendre. Soudain, une petite fille qui avait échappé aux comitadjis fit le tour de la place en courant, en criant et en pleurant.

La pauvre petite avait été découverte tandis qu’elle se cachait sous un amas de cadavres qui étaient sans doute ceux de sa mère et de sa famille, et maintenant elle fuyait devant un grand diable de Bulgare qui courait derrière elle, le sabre nu.

Rouletabille n’avait pu retenir une sourde exclamation de pitié à laquelle répondit une injure de La Candeur à l’adresse du soldat barbare.

L’enfant allait être atteinte. Une épouvante sans nom était peinte sur son visage, dans ses grands yeux qui cherchaient partout un refuge sans le trouver.

— Il y aurait un moyen de sauver l’enfant ! dit Rouletabille : ce serait de tuer le Bulgare.

Et il sortit son revolver de sa poche.

Ivana avait entendu la phrase, avait vu le mouvement. Elle se jeta sur la main du reporter.

— Vous n’allez pas commettre ce crime ? s’écria-t-elle.

— Quel crime ?… réplique Rouletabille, en se dégageant. Celui de tuer un bourreau d’enfants ?…

— C’est un Bulgare !… Et vous ne tirerez pas sur un Bulgare, moi étant là !…

— Je vous obéis, Ivana, fit Rouletabille sur un ton glacé ; mais soyez Bulgare jusqu’au bout et ayez