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Page:Leroux - Mister Flow.djvu/72

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Nuit de volupté à fond de terreur ! Il y a des moments où je comprends que l’on étrangle la femme qu’on aime. Elle gémit, mais elle ne se plaint pas. Elle ne dit plus : « Ah ! que c’est joli, my dear ! » Peut-être a-t-elle compris que je l’eusse tuée. Peut-être comprend-elle que je suis près de la tuer. Cela ne me déplaît pas qu’elle ait la terreur de cela. Cela entre dans mon plan : son amour et son épouvante ! Et peut-être aussi que cela ne lui déplaît pas non plus ! C’est une femme qui ne doit pas avoir peur de la mort, surtout quand elle s’accompagne de la plus violente caresse. Ô ! Helena ! jusqu’au fond de quel abîme sommes-nous descendus tous les deux, accrochés l’un à l’autre, et déchirés l’un par l’autre ? Celui qui voit dans la nuit éternelle ne saurait dire si nous voulons nous séparer ou nous réunir. Mais, tu ne remonteras pas sans moi !

Ta chair ne gémit plus, je n’entends plus ton souffle… Après tout, tu es peut-être bien morte !… Je tire un rideau. Les premiers rayons du jour… Tu dors comme une enfant repue… Ta lèvre qui saigne sourit. Des perles roses roulent sur tes seins, sur tes bras crucifiés et moi, je dois être beau, avec mon visage de buveur de gin et toute la pommade glacée de l’honorable J. A. L. Prim ! J’aime mieux ne pas voir ça !… J’entre dans la salle de bains. Je plonge toute cette magnifique marmelade dans le lavabo, savonnage, serviette-éponge. Devant la glace, un bel adolescent de vingt ans, au teint de jeune fille. Pas plus de poils sur les joues qu’Helena aux aisselles… Tout de