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Page:Leroux - Rouletabille chez Krupp, 1944.djvu/68

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ROULETABILLE CHEZ KRUPP

suis pas autrement fâché que les choses se soient arrangées de la sorte… du moment que je ne pouvait pas partir avec toi !… »

Rouletabille regarda bien en face La Candeur dont le trouble ne fit que grandir… Et, tout à coup, le premier reporter de L’Époque se décida à parler :

« La Candeur, je suis venu pour te dire : toutes les difficultés sont levées, tu peux venir maintenant avec moi !… »

Le géant reçut le coup bravement. Il ne s’évanouit point, car enfin, il aimait tellement Rouletabille qu’il aurait pu se trouver mal de joie. Cependant, il fut quelque temps sans pouvoir parler. Et il se reprit tout à coup à rougir et à pâlir, signe manifeste d’une émotion souveraine ! Enfin, il put prononcer :

« Tu ne blagues pas ?…

— Ai-je l’air de blaguer ? »

De fait, Rouletabille n’avait jamais paru aussi sérieux. Il regardait maintenant La Candeur le plus gravement du monde…

« Il ne faut point, dit Rouletabille, que cela t’empêche de manger !…

— Non ! merci ! c’est fini !… tu m’as… tu m’as coupé l’appétit… je m’attendais si peu !… je suis si surpris… si… content !…

— Tu es sûr que tu es content ?…

— J’en mettrais ma main au feu !… Évidemment, je suis tout bouleversé… mais ce doit être de contentement… Je t’aime tant, Rouletabille !… »

Celui-ci ne sourit point. Il se rendait parfaitement compte de ce qui se passait dans l’esprit du bon géant. Il ne doutait point de l’immense amitié que le bon géant avait pour lui, mais il savait aussi que son incroyable timidité avait fait de La Candeur un être peu… combatif, malgré son aspect redoutable… Certes ! La Candeur, dans les moments critiques, était brave, et il l’avait prouvé bien souvent… Mais, hors de ces moments critiques, La