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Chapitre neuvième

Révélation


I

« Ah ! s’il était un jour mon prisonnier, non, je ne voudrais point qu’il pérît ! je le voudrais vivant ; je voudrais qu’une douce vengeance calmât le transport qui m’agite ! »
(La Jérusalem délivrée, chant troisième.)

Hubert s’était précipité pour sortir de cette pièce où la Pieuvre venait de lui donner un conseil qui le transportait d’espérance, mais qui pouvait bien, hélas ! arriver un peu tard !… Mais déjà Mme de Meyrens lui barrait la porte.

— Calmez-vous, monsieur de Lauriac, lui dit-elle avec ce sang-froid imperturbable mêlé d’ironie qui contrastait si étrangement avec les mouvements désordonnés de l’ancien « guardian » de la Camargue… s’il n’est que Callista pour faire périr Jean, il n’est pas encore mort !… Elle est son bourreau et vous verrez que c’est encore elle qui trouvera le moyen de le sauver !… Faire passer à Santierne un pain empoisonné !… Au dernier moment, c’est elle qui s’empoisonnera !… Vous verrez cela !…

— Vous ne la connaissez pas ! elle ne respire maintenant que la vengeance !… Si je vous disais que ce matin, la chose a été faite !…

— Quelle chose ?…

— Par les soins de Callista, on a fait tenir à Jean le pain empoisonné.

— Et alors ? questionna la Pieuvre sans émotion apparente.

— Jean a refusé de toucher à ce pain !…

— Eh bien, vous voilà bien tranquille !… Pourquoi cet émoi ? Vous voyez que rien n’est perdu !…

— Mais, malheureusement ! vous ne savez pas ce que Callista a imaginé ! Voyant sa première tentative inutile, elle a décidé de la