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Page:Leroux - Une histoire épouvantable, paru dans l'Excelsior du 29 janvier au 3 février 1911.djvu/11

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» Elle m’avait donc aperçu et elle en marqua aussitôt du désagrément. Elle avait continué de faire quelques pas dans l’allée du milieu de son jardinet, et puis, haussant les épaules, comme si elle était désappointée, elle dit :

» — Rentrons, Gérard !… La fraîcheur du soir commence à faire sentir…

» Je regardai partout dans le jardin. Personne ! À qui parlait-elle ? à personne !…

» Alors, elle était folle ? Elle ne le paraissait guère.

» Je la vis s’acheminer vers sa maison. Elle en franchit le seuil, la porte se referma et toutes les fenêtres furent fermées, par elle, aussitôt.

» Je ne vis ou n’entendis rien de particulier cette nuit-là. Le lendemain matin à dix heures, j’aperçus ma voisine qui, en toilette de ville, traversait son jardin. Elle ferma la porte à clef et elle prit aussitôt le chemin de Toulon. Je descendis à mon tour. Au premier fournisseur que je rencontrai, je lui montrai cette silhouette élégante et lui demandai s’il connaissait le nom de cette femme. Il me répondit :

» — Mais parfaitement, c’est votre voisine ; elle habite avec son mari la villa Makoko. Ils sont venus s’y installer il y a un an, au moment de votre départ. Ce sont des ours ; ils n’adressent jamais la parole à personne « en dehors du nécessaire », mais vous savez, au Mourillon, chacun vit à sa guise et l’on ne s’étonne de rien. Ainsi le capitaine…

» — Quel capitaine ?

» — Le capitaine Gérard, oui, à ce