Aller au contenu

Page:Les Caquets de l'Accouchée.djvu/176

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pour l’incertain, j’aymerois mieux que tous les laquais de la Cour courussent sur le ventre de ma femme, que d’estre abstraint à ne point faire l’amour. — Je t’aime de cette humeur, cousin, me dit-elle, et veritablement tu as raison : aussi bien dois-tu croire qu’il y a quelque fatalité qui accompagne ce ramage que l’on ne sauroit esviter, et semble qu’on y est destiné. Larcher, notre procureur en Parlement, ce mangeur de patés de pheniceaux, m’a advoüé qu’auparavant son mariage ses cornes commençoient à pointer, et que plusieurs fois, faisant faire son poil, il les avoit fait voir à L’Ange, son chirurgien. — Nous entrions bien avant en lice, quand une fille de chambre, accoudée sur une fenestre, nous advertit que les dames estoient sur le seuil de la porte. Je me retire incontinent au cabinet, où je n’eus pas plustost prins place, que la compagnie entra ; chacune prit son siége selon son rang. Une maistresse des requestes, qui conduisoit la troupe, commença à parler la première. Hé bien, ma mignonne, dit-elle à l’accouchée, comme t’en va ? Il me semble que je ne t’ay point veuë en meilleur estat. Sans mentir, je te trouve plus belle que jamais. Asseurement, les enfans t’embellissent : je te conseille d’en recommencer un bien tost, si tu n’y as desjà travaillé. — Helas ! Madame, que me dites-vous ! dit l’accouchée ; je suis bien résoluë au contraire, et de faire plustost lict à part pour m’en garantir.