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Page:Les Caquets de l'Accouchée.djvu/177

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Je suis desjà chargée de cinq petites canailles, qui crient continuellement ; je ne puis prendre ny repos ny patience ; ils me tourmentent nuict et jour. Hé, bon Dieu, que deviendrois-je si j’en avois davantage ? — Ma fille, tu es bien folle, dit alors la maistresse des requestes ; ce ne sont que gentillesses ; auparavant qu’ils soient en estat de te donner beaucoup de peine, tu en auras perdu la moitié, ou peut-estre tout. Si tu estois comme moy, veritablement tu serois à plaindre. J’ay quatre grandes filles, la plus jeune aagée de dix-huict ans, desquelles je ne me puis deffaire. C’est une grande pitié aujourd’huy, que, quelque gentilles et bien conditionnées qu’elles soient, l’on ne sçauroit les pourvoir si on ne leur donne des miliers d’escus. Un conseiller de la Cour, ni un maistre des comptes, n’espouseront point une fille si elle ne paye leur office, qu’ils achètent pour la pluspart à la bource d’autruy. J’en suis quelquefois au desespoir. — Madame, je sçay un bon remède, dit la femme d’un conseiller des requestes du Palais, de la ruë Montorgueil : il faut faire comme nostre voisin, marier ses filles dans les petites villes ; il a rencontré, avec dix mil escus qu’il a promis à sa fille, un jeune homme de bonne mine, des meilleures familles de Moulins, bien qualifié, qui luy rend des effects pour quatre vingts quatre mil livres. — Madamoiselle, dit une changeuse du pont Nostre-Dame, permettez-moi que je vous die qu’il