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Page:Les illégalités et les crimes du Congo, 1905.djvu/21

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Comment cela ? me direz-vous. Voici. Ce Malgache, ce Soudanais, ce Canaque est français. Or, le décret relatif à la naturalisation dans les colonies (7 février 1897) ne vise que les étrangers : ceux-ci peuvent devenir citoyens français ; le Soudanais étant malheureusement déjà français ne peut, lui, devenir citoyen français. Vous entendez bien : un Russe, un Allemand, un Grec, établi à Madagascar, par exemple, peut devenir citoyen français, Le Malgache ? Non.

Et pourquoi ?

Délicieuse raison légale, que j’ai déjà indiquée : l’indigène est déjà français (mais français inférieur) ; le Grec est étranger : c’est ce qui fait sa supériorité.

Je ne plaisante pas. Messieurs. Tout cela est rigoureusement exact. Examinez la situation d’un docteur malgache de la Faculté de médecine de Paris : je sais, pour ma part, deux Malgaches qui possèdent ce diplôme, conquis par un sérieux et solide travail : je ne serais nullement surpris qu’il y eût plusieurs autres Malgaches pourvus de ce grade. Admettez un instant que l’un de ces hommes de science, de formation toute française, ait rendu à la France, à la colonie, les plus signalés services. Il demande la pleine naturalisation. Malgré toute la bonne volonté de l’administration française, il ne pourra pas l’obtenir. À côté de ce Malgache français, un Allemand, un Anglais, un Espagnol, un Russe, un Italien ou un Grec a fait tranquillement sa fortune à Madagascar. Il sera très facilement, s’il le désire, citoyen français.

La législation actuelle, législation qui s’est faite, pour ainsi dire, toute seule, sans que personne, j’aime à me le persuader, l’ait pensée, l’ait voulue, est telle.

Dura lex ! Loi dure, loi aussi absurde que dure ! Les plus parfaites sottises et iniquités législatives ne sont pas toujours celles dont le législateur a la responsabilité directe.

Cette infériorité des Malgaches dans leur propre pays vis-à-vis non seulement des Français de France ou des nègres de la Réunion, mais vis-à-vis même des étrangers, est bien douloureuse à une foule d’autres points de vue. Elle