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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 1, 1835.djvu/12

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secours des Égyptiens, des Arabes, de divers autres peuples, et toute l’armée s’assemblait dans la plaine de Thymbrée, sur les bords du Pactole. Elle était forte de soixante mille hommes de cavalerie, et de trois cent soixante mille d’infanterie, parmi lesquels il y avait cent vingt mille Égyptiens, armés de grands boucliers, de longues piques et de courtes épées. Les autres ne portaient que des javelots et des boucliers de cuir fort légers. Les frondeurs et les archers formaient un corps très nombreux ; on comptait environ trois cents chariots de guerre. Crésus attendait encore des troupes et rassemblait des vivres de toutes les provinces circonvoisines.

Informé par ses espions de ce qui se passait, Cyrus ne voulut pas laisser le temps à ses ennemis de se fortifier davantage. Il en était séparé par quinze journées de marche, à travers les déserts de la Mésopotamie. Il donna ordre à son armée de se pourvoir de vivres, prit d’ailleurs toutes les mesures pour conserver un ordre avantageux. La cavalerie s’avançait la première, précédée des coureurs qui faisaient la découverte ; venaient ensuite les chariots de guerre, le gros bagage et les bêtes de somme ; l’infanterie suivait. Un nombre suffisant de pionniers avait été distribué par pelotons à la tête du bagage.

Lorsque le terrain le permettait, l’armée présentait le plus grand front possible ; quand le terrain se resserrait, les équipages se mettaient à la file, et l’infanterie prenait de droite et de gauche, couvrant les côtés.

Cyrus apprit par quelques prisonniers, et par ses coureurs, qu’il n’était plus qu’à trois lieues de Crésus. Il commanda alors de faire halte, et résolut de former son ordre de bataille. Le retour d’Araspe, qui, de concert avec le roi, avait passé comme transfuge dans le camp des ennemis, lui fit connaître leurs forces et leurs dispositions.

Ils présentaient une seule ligne[1] ; l’infanterie au centre ; la cavalerie occupant les ailes, et entremêlée de gros bataillons d’infanterie. Ces deux armes étaient partout sur trente de hauteur, excepté chez les Égyptiens, qui avaient formé des bataillons carrés, chacun de dix mille hommes sur cent de front et autant de profondeur.

L’Égypte est un pays coupé par des canaux ; là une armée ne peut s’étendre sans séparer les parties qui la composent, et il n’est pas toujours facile de conserver des communications entre elles. Les Égyptiens avaient adopté une pareille disposition, qui n’offrait point d’endroit faible, parce qu’ils faisaient également face de tous les côtés, ce qui les mettait moins dans la nécessité d’être soutenus que les corps étendus en phalange, à la manière des Grecs ou des Asiatiques. Aussi, malgré les instances de Crésus, ils ne voulurent rien changer à cette ordonnance. Leur place était au centre de l’infanterie ; les carrés gardaient une certaine distance entre eux. Le front de bandière de toute l’armée de Crésus mesurait quarante stades, ou près de deux lieues.

Cyrus, dont les forces n’atteignaient pas la moitié de celles de son ennemi, comprit de suite qu’il serait débordé, et que le dessein de Crésus était d’envelopper ses ailes avec sa cavalerie, pendant que l’infanterie attaquerait de front.

  1. Voyez l’ATLAS.
    A. Armée de Cyrus.
    B. Armée de Crésus.
    1. Les deux corps qui enveloppent l’armée de Cyrus.
    2. Réserve de Cyrus.
    3. Escadron des chameaux.
    4. Manœuvres des réserves.