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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 1, 1835.djvu/249

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THUCYDIDE, LIV. IV.

s’étant mis à charger les premiers leurs ennemis, qui prenaient le large : en sorte que les Syracusains, sans avoir éprouvé de désavantage dans le combat qui se livra sur la côte, entrèrent au port de Messène. Les Athéniens, après cela, se portèrent à Camarine, sur l’avis qu’Archias et sa faction voulaient livrer cette place aux Syracusains.

En même temps les Messéniens, avec toutes leurs forces, allèrent attaquer par terre et par mer Naxos, colonie des Chalcidiens, qui leur est limitrophe. Le premier jour, ils forcèrent les habitans à se tenir renfermés dans la place et ravagèrent le pays ; le lendemain, ils suivirent, sur leurs vaisseaux, le cours du fleuve Acésine, et ravagèrent la campagne, pendant que leurs troupes de terre attaquaient la place. Mais les Sicules, qui dominent les hauteurs, descendirent en grand nombre pour repousser les Messéniens. En les voyant s’avancer, les Naxiens reprirent courage et s’animèrent les uns les autres, persuadés que c’étaient les Léontins et les autres Hellènes alliés qui venaient les soutenir. Dans une sortie précipitée, ils se jetèrent sur les Messéniens et en tuèrent plus de mille. Le reste eut beaucoup de peine à retourner à Messène ; les barbares, tombant sur eux dans les chemins, en tuèrent la plus grande partie.

Les vaisseaux qui avaient pris position à Messène, se séparèrent et regagnèrent leurs ports. Aussitôt les Léontins et leurs alliés, de concert avec les Athéniens, profitèrent de la consternation de Messène pour l’attaquer. La flotte athénienne battait le port, et les troupes de terre la ville : les Messéniens firent une sortie avec quelques Locriens que commandait Démotèle, et qui, après leur échec, étaient restés en garnison dans la place. Ils surprennent les ennemis, mettent en fuite la plus grande partie des Léontins, et tuent beaucoup de monde. Les Athéniens, voyant le désastre de leurs malheureux alliés, prirent terre, coururent à leur secours, tombèrent sur les Messéniens en désordre, les poursuivirent jusqu’à la ville, et retournèrent à Rhégium, après avoir dressé un trophée. Depuis, les Hellènes de Sicile continuèrent par terre leurs hostilités les uns contre les autres, sans que les Athéniens y prissent part.

Chap. 26. Ceux-ci continuaient à Pylos de tenir les Lacédémoniens assiégés dans l’île de Sphactérie, et les troupes du Péloponnèse restaient campées sur le continent. La garde de l’île était pénible pour les Athéniens, parce qu’ils manquaient de vivres et d’eau. Ils n’avaient qu’une seule pièce d’eau peu considérable dans l’acropole de Pylos. La plupart faisaient, sur le bord de la mer, des fouilles dans le gravier ; et l’on peut juger quelle eau ils buvaient. D’ailleurs, le lieu où ils avaient assis leur camp étant très resserré, ils se voyaient eux-mêmes fort à l’étroit. Il n’y avait pas de rade capable de contenir la flotte, en sorte qu’une partie de l’équipage se retirait à terre pour prendre de la nourriture, tandis que le reste se tenait à l’ancre en pleine mer. Ce qui les décourageait surtout, c’était la longueur du siége. Ils avaient espéré que peu de jours leur suffiraient pour réduire des hommes renfermés dans une île déserte, et n’ayant pour boisson que de l’eau saumâtre. Leur espoir fut trompé, et voici par quelle cause. Les Lacédémoniens avaient invité toutes les personnes de bonne volonté à introduire dans Sphactérie de la farine, du vin, du fromage, et toute autre espèce de provisions utiles à des assiégés. Chaque cargaison était taxée à un prix très élevé, et chaque Hilote qui se chargeait du transport, devait encore avoir la liberté pour ré-