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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 1, 1835.djvu/252

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THUCYDIDE, LIV. IV.

voir de quel côté il faudrait se porter mutuellement des secours.

Chap. 30. Son échec en Étolie, qu’un bois avait, en partie, occasionné, ne contribuait pas peu à lui suggérer ces réflexions [il en était tout occupé lorsque l’incendie éclata]. Comme l’île avait fort peu de largeur, les soldats étaient obligés d’aller avec des gardes avancées préparer leur repas tout à l’extrémité. Un d’entre eux mit involontairement le feu à quelques broussailles. Le vent s’étant élevé, la flamme gagna, et la plus grande partie de la forêt se trouva embrasée avant qu’on s’en fût aperçu. Démosthène avait soupçonné jusque là que les assiégés, auxquels on faisait passer des vivres, n’étaient qu’en petit nombre ; mais le terrain ainsi dépouillé le mit à portée de reconnaître que les Lacédémoniens étaient en plus grand nombre. Il avait profité de cette découverte pour exhorter les Athéniens à redoubler d’activité, en leur montrant, d’une part, qu’ils avaient à combattre un ennemi dont les forces n’étaient pas à mépriser, et, de l’autre, que la descente était devenue bien plus facile. Déjà les alliés voisins avaient reçu ordre de lui envoyer des renforts ; toutes ses autres dispositions faites, il se préparait à l’attaque. Cependant Cléon, qui s’était fait précéder d’un courrier pour annoncer son arrivée avec les troupes qu’il avait demandées, aborde à Pylos. Les deux chefs tiennent conseil, et commencent par envoyer un héraut a l’armée ennemie qui était sur le continent. Il avait ordre de demander aux généraux s’ils voulaient prévenir les dangers qu’allaient courir les soldats de Sphactérie, de les sommer de déposer les armes et de se rendre aux Athéniens, armes et personnes, sous condition que, jusqu’à l’accommodement général, ils seraient traités avec douceur dans leur captivité.

Chap. 31. La proposition fut rejetée. Pendant un jour les Athéniens se tinrent tranquilles ; mais le lendemain, ils embarquèrent tous leurs hoplites sur quelques bâtimens, et mirent à la voile. Un peu avant l’aurore, ils débarquèrent des deux côtés de l’île, et du côté de la haute mer, et du côté du port, au nombre de huit cents. Ils fondirent d’abord sur les gardes avancées : car voici quelle était la disposition des troupes lacédémoniennes. À ce premier poste étaient environ trente hoplites ; le gros de l’armée, où se tenait le général Épitadas, posté près de l’endroit où était l’eau douce, occupait le milieu et la partie la plus plate de l’île ; une poignée de soldats veillait à l’autre extrémité qui regarde Pylos. Cet endroit, du côté de la mer, était très escarpé, et imprenable du côté de la terre ; on y voyait encore un petit château très ancien, construit de pierres choisies, mais non taillées. Les assiégés comptaient bien s’en faire une ressource en cas que, pressés par des forces supérieures, ils fussent obligés de se retirer. Telle était la disposition de l’armée lacédémonienne.

Chap. 32. Les Athéniens massacrèrent les soldats de la première garde, qu’ils surprirent dans leurs gîtes, saisissant encore leurs armes. Ceux-ci ne s’étaient point aperçus de la descente, persuadés que le bruit qu’ils entendaient n’était autre que celui des vaisseaux qui, selon la coutume, stationnaient la nuit autour de l’île. Avec le jour, on vit aborder plus de soixante-dix autres bâtimens. C’était le reste de l’armée athénienne. Tous, à la réserve des Thalamites, s’avancèrent en bon ordre, suivis de huit cents archers, d’un nombre à peu près égal de peltastes, des Messéniens auxiliaires, en un mot de toutes les troupes qui étaient à Pylos, excepté celles qu’on avait laissées pour défendre la place.