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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 1, 1835.djvu/267

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THUCYDIDE, LIV. IV.

Chap. 72. Dès le lever de l’aurore parurent les Béotiens. Même avant le message de Brasidas, ils avaient résolu de venir au secours de Mégares, ne se croyant pas étrangers aux périls que courait cette place ; et d’ailleurs ils se trouvaient déjà sur te territoire de Platée avec toutes leurs forces : mais l’arrivée du message ajouta beaucoup à leur première ardeur. Ils envoyèrent donc à Brasidas deux mille deux cents hoplites et six cents hommes de cavalerie, et s’en retournèrent avec le reste. On ne comptait pas dans l’armée moins de six mille hoplites. Ceux d’Athènes se tenaient rangés à Nisée et sur le bord de la mer ; les troupes légères étaient éparses dans la plaine. La cavalerie béotienne, tombant sur ces derrières, leur causa d’autant plus de surprise, que jusqu’alors il n’était venu de nulle part aucun secours aux Mégariens : elle les poussa jusqu’à la mer. La cavalerie d’Athènes vint faire face à celle de Béotie : l’engagement des deux corps de cavalerie fut long, et chacun d’eux s’attribua la victoire. Il est bien vrai que les Athéniens poussèrent, du côté de Nisée, le commandant de la cavalerie béotienne et un petit nombre de ses cavaliers, qu’ils tuèrent et dépouillèrent ; que, maîtres de leurs corps, ils donnèrent aux ennemis la permission de les enlever, et qu’ils dressèrent un trophée : mais, à considérer l’affaire dans son ensemble, on se sépara sans avoir remporté, de part ni d’autre, un avantage certain. Les Béotiens retournèrent à leur camp ; les Athéniens, à Nisée.

Chap. 73. Brasidas et son armée se rapprochèrent ensuite de la mer et de la ville de Mégares. Ils se saisirent d’un poste avantageux, et s’y tinrent en ordre de bataille, pensant que les Athéniens s’avanceraient contre eux. Ils savaient bien que les habitans observaient de quel côté pencherait la victoire ; ils sentirent que, dans cette circonstance, ils auraient un double avantage ; d’abord ils n’attaqueraient pas les premiers et ne provoqueraient pas d’eux-mêmes un combat et ses dangers ; ensuite, comme ils avaient montré leur empressement à secourir les Mégariens, l’honneur de la victoire (dût-on ne pas combattre) leur appartenait, à juste titre, sans coup férir, et leurs projets sur Mégares, par cela même, auraient plus de succès ; tandis que, s’ils ne se fussent pas montrés, l’événement n’eût plus été douteux ; alors, les Mégariens les jugeant vaincus, ils auraient perdu Mégares, au lieu que, dans la position actuelle, il pourrait arriver que les Athéniens ne voulussent pas en venir aux mains, en sorte qu’ils rempliraient sans combat l’objet pour lequel ils s’étaient mis en campagne. Ce qu’ils avaient prévu arriva. Les Athéniens, en effet, s’étant présentés en bataille en dehors des grandes murailles, se tinrent en repos, voyant que l’ennemi ne venait pas les attaquer. Les généraux, réfléchissant sur leurs précédens succès, avaient jugé qu’il n’y avait pas pour eux égalité de chances à engager, contre des troupes plus nombreuses, un combat d’où résulterait, s’ils étaient vainqueurs, la prise de Mégares ; s’ils étaient vaincus, la perte de la meilleure partie des hoplites : tandis que les Lacédémoniens, ne compromettant qu’une partie de la force totale, et même qu’une portion des troupes de chaque peuple confédéré, devaient naturellement tenter l’aventure.

Chap. 74. D’après cette considération, les Athéniens ayant attendu quelque temps, et les deux partis n’ayant fait aucun effort l’un contre l’autre, on se retira, les Athéniens les premiers à Nisée, ceux de Lacédémone au lieu d’où ils étaient partis. Alors les Mégariens (ceux de la ville qui entretenaient des liaisons avec les exilés) ouvrirent les