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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 1, 1835.djvu/329

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THUCYDIDE, LIV. V.

tant plus sûrs, que, par notre proximité du Péloponnèse, nous pouvons mieux les aider dans leurs guerres, et qu’à raison de nos rapports de consanguinité, ils ont plus de confiance dans notre fidélité que dans celle de toute autre république. »

Chap. 109. Les Athéniens. « Ce n’est pas précisément dans la bienveillance de ceux qui implorent des secours que la puissance invoquée voit sa sûreté, mais bien dans les forces qui peuvent répondre du succès. Or c’est à quoi les Lacédémoniens font encore le plus d’attention. Aussi se défient-ils même de leur armement domestique, et jamais ils ne vont attaquer que réunis à des alliés. Il n’est donc pas vraisemblable qu’ils osent passer dans une île où nous sommes, nous qui avons l’empire de la mer. »

Chap. 110. Les Méliens. « Eh bien ! ils nous enverront des auxiliaires. La mer de Crète a de l’étendue : il sera plus difficile à ceux qui s’en disent les maîtres de les y surprendre, qu’à eux de se sauver, s’ils veulent échapper à la vigilance de ces dominateurs. Mais admettons qu’ils n’y réussissent pas : ils tourneront alors leurs armes contre votre pays et contre ceux de vos alliés que Brasidas n’a point attaqués : et ce ne serait plus alors pour un sol étranger que vous combattriez ; le théâtre de vos travaux serait dans votre propre patrie, et sur les terres de vos alliés. »

Chap. 111. Les Athéniens. « Une partie de ce malheur est précisément ce qui va vous arriver à vous-mêmes. Vous apprendrez, par expérience, que jamais la crainte d’une diversion n’a forcé les Athéniens à lever un siége. Mais nous faisons une réflexion : vous avez annoncé que cette délibération aurait pour objet le salut de votre pays, et dans le cours d’une si grave conférence vous n’avez encore montré aucun des moyens qui peuvent fonder vos espérances de salut. Vos ressources les plus réelles ne sont que des espérances entrevues dans le lointain ; à l’égard de vos ressources actuelles, elles sont insuffisantes pour vous défendre contre la puissance qui vous attaque dans ce moment même. Certes, vous faites preuve d’une insigne folie, si, après nous avoir fait sortir pour délibérer de nouveau, vous ne revenez pas à un plus sage parti ; car, sans doute, vous ne prendrez pas pour conseil la fausse honte, qui perd ordinairement les hommes en les précipitant en des périls manifestes, d’où naît pour eux une honte trop réelle. En effet, combien de gens qui avaient encore assez de présence d’esprit pour voir l’écueil contre lequel ils allaient se briser, craignant ce qu’on veut appeler déshonneur, et subjugués par l’influence d’un vain mot, se sont précipités volontairement dans un abîme de malheurs, et par-là ont encouru l’infamie, plus honteuse encore quand elle procède de la folie que quand elle est l’œuvre de la fortune. Vous éviterez votre ruine, si vous êtes sages, et ne croirez pas déshonorant de faire un sacrifice à la république la plus puissante, qui vous offre son alliance à des conditions modérées, et qui vous laisse paisibles possesseurs de votre pays soumis à un simple tribut. Elle vous a donné l’option de la guerre ou d’une existence sûre et trauquille ; elle vous invite à ne pas faire, par obstination, le plus mauvais choix. Noble fermeté vis-à-vis les égaux, égards et déférence pour les supérieurs, modération envers les inférieurs, voilà les meilleurs principes pour affermir la fortune d’un peuple. Nous allons nous retirer. Pesez donc encore mûrement cette affaire, et considérez bien qu’il s’agit de votre patrie, que vous n’en avez qu’une,