Aller au contenu

Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 1, 1835.djvu/69

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 68 —

arpenteurs de ce prince, et il est bien reconnu aujourd’hui que les anciens se servaient de stades de différentes grandeurs.

Cinq cents cavaliers, chacun d’eux ayant un soldat en croupe, parcoururent un espace de quatre cents stades, suivant Arrien, dans une partie d’un jour et une nuit entière. En employant le stade pythique de cent vingt-cinq toises, ce détachement de cavalerie aurait fait vingt lieues, chacune évaluée à deux mille cinq cents toises ; ce qui est impossible. Si, au contraire, on se sert du stade reconnu par d’Anville pour être de cinquante et une toises, dans toutes les marches d’Alexandre, ces vingt lieues se trouvent réduites à huit environ, et le fait devient très vraisemblable.

Les Macédoniens, poursuivant Satibarzanes dans sa retraite, firent en deux jours six cents stades, évalués, par le calcul ordinaire, à trente lieues. Ils en auraient donc fait quinze par jour, au lieu de six environ que donne le stade fixé par d’Anville. Alexandre marchant à Maracanda, pour en chasser Spitamène, parcourt quinze cents stades en trois jours. Le stade pythique fournit une évaluation de soixante-quinze lieues, qui par le stade de cinquante et une toises, se trouvent réduites à trente environ. On pourrait citer un plus grand nombre d’exemples.

Au reste la marche du jeune Cyrus, et celle des dix mille, décrites avec exactitude par Xénophon, démontrent que les historiens d’Alexandre ont été faussement taxés d’exagération. En allant à Cunaxa, les troupes de Cyrus faisaient ordinairement cinq parasanges par campement, et quelquefois davantage ; ainsi, lorsqu’elles traversèrent la Lydie pour arriver au fleuve Mæandre, elles firent trois campemens, et vingt-deux parasanges, c’est-à-dire sept parasanges et plus d’un tiers par campement. Ces troupes partant d’Iconium, ville de Phrygie, firent encore trente parasanges en cinq marches ou campemens ; dirigeant leur route à la gauche de l’Euphrate, cinq campemens et trente-cinq parasanges. Il faut nécessairement observer que l’armée de Cyrus était composée, en grande partie, d’infanterie pesante, et que ses nombreux équipages devaient l’embarrasser beaucoup.

Les marches des dix mille, après la bataille de Cunaxa, ne furent pas moins accélérées. Quelquefois elles sont plus courtes, à cause de la difficulté des chemins. On en trouve cependant une très longue, dans le pays des Taoques où l’armée fit en cinq campemens trente parasanges. Sa marche à travers la province des Chalybes, qui harcelaient continuellement les Grecs, présente encore cinquante parasanges en sept campemens.

Xénophon, selon d’Anville, emploie des parasanges évaluées chacune à deux mille deux cent soixante-huit toises, qui, fraction retranchée, donnent quarante-cinq stades par parasange. Les dix mille auraient donc fait, par campement, deux cent vingt-six, deux cent soixante-douze, trois cent dix-sept, et jusqu’à trois cent soixante-dix stades ; et leurs marches égalent, par conséquent, les plus longues de l’armée d’Alexandre.

Les dix mille ont souvent fait plusieurs campemens sans séjourner. Ils réussirent même un instant, par leurs marches forcées, à se mettre hors de la portée de l’ennemi, lorsqu’après le passage du Centrite, la cavalerie persane n’osa pas s’engager dans les montagnes des Carduques. Les Macédoniens les ont imités en plusieurs circonstances, et l’on voit que Ptolémée étant à la poursuite de Bessus, fit dans quatre jours et quatre nuits, dix campemens. Ajoutons que les