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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/1010

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POLYBE, LIV. XXXIV.

Péloponnèse aux Colonnes, plus du double de stades que Dicéarque n’en assigne ; et, dans son système, vous devrez en compter encore davantage pour le trajet du Péloponnèse au fond du golfe Adriatique. »

Oui, sans doute, répondra-t-on à Polybe, sur ce dernier point l’erreur de Dicéarque devient évidente par la preuve que vous-même en donnez lorsque vous comptez du Péloponnèse à Leucade 700 stades, de Leucade à Corcyre 700, de Corcyre aux monts Cérauniens 700, des monts Cérauniens, en suivant à droite la côte d’Illyrie, jusqu’à l’Iapygie 6 130 ; mais quant à la distance depuis le détroit de Sicile jusqu’aux Colonnes d’Hercule, on trouvera également faux et le calcul par lequel Dicéarque ne le fait que de 7 000 stades et celui dont vous pouvez avoir démontré la justesse ; car l’opinion la plus généralement reçue est que cette distance, prise directement au travers de la mer, doit être de 12 000 stades : calcul qui s’accorde avec la longueur que l’on donne à la terre habitée. Cette longueur est supposée, au plus, de 70 000 stades, dont environ 30 000 se prennent pour la portion qui s’étend vers l’ouest, depuis le golfe d’Issus jusqu’à l’extrémité la plus occidentale de l’Ibérie, et se compte ainsi : du golfe d’Issus à Rhodes, 5 000 stades ; de Rhodes au cap Salmonéon, qui forme l’extrémité orientale de la Crète, 1 000 ; pour la longueur de la Crète jusqu’au Criu-Métopon, plus de 2 000 ; de là au cap Pachynum en Sicile, 4 500 ; du cap Pachynum, au détroit de Sicile, plus de 1 000 ; du détroit de Sicile aux Colonnes d’Hercule, 15 000 ; enfin, des Colonnes à l’extrémité du promontoire sacré de l’Ibérie, environ 3 000.

De plus, la mesure de la perpendiculaire dont parle Polybe n’est point juste, si toutefois il est vrai que le parallèle de Narbonne est à peu près celui de Marseille, et que Marseille, comme Hipparque lui-même en est persuadé, se trouve sous le parallèle de Byzance. En effet, la ligne tirée directement au travers de la mer suit le parallèle de Rhodes et du détroit des Colonnes : or, entre Rhodes et Byzance, censées se trouver toutes deux sous le même méridien, on compte environ 5 000 stades ; ainsi la perpendiculaire dont il s’agit devrait en avoir autant. Mais comme on prétend aussi que le plus grand trajet d’Europe en Libye (Afrique), au travers de la Méditerranée, à partir du golfe Galatique, est de 5 000 stades, il doit y avoir ici de l’erreur ; ou bien il faudrait donc que dans cette partie les côtes de la Libye avançassent beaucoup vers le nord et atteignissent le parallèle des Colonnes d’Hercule.

Polybe s’égare encore lorsqu’il suppose que cette même perpendiculaire doit passer près de l’île de Sardaigne : elle passe bien plus à l’ouest, laissant entre elle et l’île toute la mer de Sardaigne, même presque toute la mer de Ligurie.

On peut dire aussi que la longueur assignée par Polybe aux côtes est exagérée[1], mais sur ce dernier article son erreur est moins forte que sur les deux autres.

Polybe s’attache à rectifier les erreurs d’Ératosthène, et tantôt le reprend avec justice, tantôt se trompe plus que lui.

Par exemple, Ératosthène compte d’Ithaque à Corcyre 500 stades, et Polybe plus de 900. D’Épidamne à Thes-

  1. Cette longueur, prise le long de toutes les côtes, est assez juste. Elle ne paraît excessive dans Polybe que parce qu’il l’employait en ligne droite. Au reste les reconnaissances géographiques les plus modernes nous prouvent que dans cette discussion, Polybe est toujours plus près de la vérité qu’Ératosthène et Strabon.