Aller au contenu

Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/20

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 12 —

Mais l’histoire ne nous instruit point assez de l’arrangement particulier, ni de la profondeur des corps qu’elle appelle vaguement catervæ ; elle ne nous apprend pas non plus si les troupes étaient partagées en plusieurs espèces, armées pour des services différens, ou si l’on ne connaissait qu’un seul genre de soldats ; enfin nous ignorons quelle était leur discipline, ce qu’il importerait le plus de savoir, pour juger le caractère de ce peuple.

Nous sommes plus instruits des fausses idées des Gaulois sur la castramétation. S’ils avaient la prudence de choisir quelquefois des positions avantageuses, la confiance ou la négligence les faisait camper le plus souvent au hasard et sans précaution. Ils connaissaient la force des camps romains, et ne voulaient pas les imiter ; soit qu’ils les regardassent comme la ressource de la timidité et de la faiblesse, indignes par conséquent de l’audace gauloise ; soit qu’ils les crussent peu nécessaires à des soldats qui voulaient toujours combattre ; ou enfin qu’ils en craignissent les travaux.

Les Romains battus se retiraient dans leur camp qui était bien retranché ; les Gaulois, après une bataille malheureuse, n’avaient point de retraite ; et l’on remarque qu’ils perdaient toujours plus de monde dans les déroutes que dans les actions. Leurs villes n’étaient guère mieux fortifiées que leurs camps, ou ils ne savaient pas les défendre, si l’on en juge par la facilité avec laquelle les Romains les prirent les unes après les autres.

Quant à la science militaire proprement dite, qui embrasse les projets et les opérations d’une campagne, les Gaulois en étaient fort éloignés. Ils entreprenaient la guerre avant d’en avoir préparé les moyens, et la conduisaient sans plan, sans objet déterminé, sans aucun calcul sur la difficulté des lieux et les ressources des ennemis. Ils n’étaient pas si simples qu’ils ne se servissent quelquefois de ruses, de stratagèmes, selon le génie de leurs chefs ; mais en général ils ne connaissaient que la force ouverte et les batailles. On est fatigué en lisant leurs annales, de compter leurs nombreuses défaites, et de ne pouvoir attribuer quelques victoires qu’ils remportèrent qu’à leur seule valeur.

Les Romains, tout en redoutant la furie gauloise, ne furent pas long-temps sans reconnaître la supériorité qu’ils avaient, à tous égards, sur des ennemis qui ne savaient que se battre. Tite-Live fait dire à des ambassadeurs romains que les guerres des Gaulois, en comparaison de celles d’Annibal, avaient moins été des guerres que des tumultes.

Dans les commencemens, ces tumultes, rappelant les idées funestes de la journée de l’Allia et de la prise de Rome, excitaient une si grande frayeur, que toute la jeunesse, ceux que leur âge ou des priviléges exemptaient de la milice, les prêtres même étaient obligés de marcher contre les Gaulois ; et il y avait un trésor particulièrement affecté aux guerres que pouvaient entraîner ces sortes d’alarmes. Mais des succès aussi continuels devaient rassurer les Romains, et ils finirent par considérer les invasions subites des Gaulois comme des entreprises plus bruyantes que dangereuses.

L’année suivante, les consuls Marcus Claudius Marcellus, et Cn. Corn. Scipion Calvinus, vinrent pour achever de tout soumettre. Environ trente mille Gaulois, accourus des bords du Rhône, voulurent défendre les Insubres ; ils furent vaincus, et les chefs des Gaulois se rendirent à discrétion.

Ce fut par la conquête du pays des Boïes, dit Polybe, que se termina la