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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/227

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César, bien informé du dessein de son ennemi, et connaissant d’ailleurs le caractère bouillant et impétueux des Gaulois, résolut de les contenir sur tous les points, en leur montrant partout à la fois les forces de Rome.

Il envoie au nord oriental de la Gaule, sur les bords de la Moselle, Titus Labienus avec un corps considérable de cavalerie, et le charge de veiller sur les Trevires que leur désertion à la bataille de la Sambre avait rendus suspects. Cette démonstration doit suffire pour déconcerter les Belges, et arrêter les Germains qui projettent de passer le fleuve.

Il fait marcher au sud occidental P. Crassus avec douze cohortes et un autre grand corps de cavalerie, et lui enjoint de contenir les habitans de l’Aquitaine s’ils veulent fournir quelques secours aux confédérés.

Titurius Sabinus va se rendre avec trois légions au bord de l’Océan pour s’opposer aux Unelles, aux Curiosolites et aux Lexobes qui habitaient vers le nord de l’Armorique.

Enfin César confie sa flotte au jeune Decius Brutus, et y joint les vaisseaux gaulois qu’il avait fait prendre chez les Pictons et les Santons, habitans des côtes que l’on nomme aujourd’hui le Poitou et la Saintonge ; peuples qui n’étaient ni soumis aux Romains, ni en guerre avec eux, mais qu’apparemment la terreur rendait dociles aux ordres de César. Le proconsul se réserve l’élite des troupes de terre, et la guerre contre les Venètes, la nation la plus redoutable de ces parages, l’âme de cette confédération.

Les villes de ce peuple semblent n’avoir été que des retraites de pêcheurs. Elles se présentaient toutes bâties à l’extrémité des promontoires. On n’y pouvait parvenir que par un seul chemin, tel encore que la mer en reflux le couvrait tout entier. Si les vaisseaux pouvaient aborder à la faveur de la marée, ils restaient à sec quand elle se retirait. Ainsi ces villes paraissaient inaccessibles aux flottes et aux armées.

Leur situation donnait de l’audace aux Venètes ; ils se persuadaient que la disette des vivres entraînerait bientôt la retraite des Romains. On voit que tous les peuples de la Gaule ne connaissaient d’autre guerre que celle des Barbares, laquelle se fait par des incursions passagères.

Le génie des Romains grandissait surtout devant les obstacles. César, dès qu’il attaquait une de ces places, contenait la mer par des digues établies aux deux côtés du chemin ; il élevait une terrasse à la hauteur du mur, et entrait dans la ville. Alors les habitans montaient à la hâte sur leurs barques, emportaient leurs effets, et se réfugiaient dans une autre ville qu’on devait assiéger avec autant de difficultés et de précautions. La plus grande partie de la campagne fut consommée par cette manœuvre.

César décrit les navires des Gaulois ; mais il est difficile d’en comprendre la forme. Construits en chêne, leurs flancs étaient épais, leur proue élevée ; cependant ces vaisseaux prenaient moins d’eau que ceux des Romains, et passaient sans danger sur les écueils et les bas fonds qui remplissaient la plage. Les Gaulois attachaient les ancres avec des chaînes de fer ; leurs voiles étaient de peaux ; soit, dit César, que ces peuples manquassent de lin, ou que l’art de fabriquer la toile leur fût inconnu ; soit qu’ils en crussent le tissu trop faible pour résister à la violence des vents et des tempêtes de l’Océan.

Las de prendre de petites places dé-