Aller au contenu

Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/281

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 273 —

Jamais il ne tomba dans la tête d’un Grec ou d’un Romain, de traiter les Perses et les Carthaginois comme des sauvages. Ils leur ont dit beaucoup d’autres injures ; mais ils ne niaient pas leur civilisation.




CHAPITRE XIII.


Guerre civile. — Suite des campagnes de Jules César. — Bataille de Pharsale.


Conquérant de la Gaule, César s’était formé, pendant huit années de combats, une armée formidable de dix légions et une excellente cavalerie que l’on fait monter à dix mille chevaux. Pompée, toutefois, pouvait disposer du reste des forces de l’empire.

La Grèce et les provinces conquises de l’Orient ; l’Afrique et l’Espagne, dont il était gouverneur, respectaient ses ordres. L’Italie, Rome presque entière se déclaraient pour lui, et il est certain qu’au moment où César passa le Rubicon, et commença la guerre avec la seule treizième légion, Pompée avait, en Italie, plus de dix légions sous les armes.

On s’imagina que César, placé, dans les Gaules, entre deux grandes armées qui l’observaient, n’oserait point attaquer l’Italie ou l’Espagne, de peur de compromettre les Gaules. Ce fut ce raisonnement spécieux qui séduisit presque tous les sénateurs.

Cependant son approche jette une telle épouvante dans Rome, que les consuls et la plupart des magistrats prennent la fuite. Toutes les villes le reçoivent avec empressement ; les troupes destinées à le combattre sortent de leurs places fortes pour venir se joindre à ses troupes ; et Pompée, qui pouvait organiser, en Italie, la défense la plus énergique, ne voit rien de mieux à faire, pour calmer cette crise, que de transporter la guerre en Grèce.

On ne reconnaît pas sans étonnement que le parti de Pompée manqua d’abord d’espions et d’avis. Si l’on avait examiné de sang-froid la marche de César, et qu’on en eût rendu un compte exact dans Rome, le sénat opposait de suite les deux légions tirées des Gaules, auxquelles Pompée pouvait joindre un nombre considérable de recrues. Ces troupes étaient suffisantes pour arrêter l’ennemi jusqu’à ce qu’on appelât d’autres légions ; et l’on se mettait alors en état de prendre l’offensive.

César n’ignorait rien des forces et des ressources de son ennemi ; mais les coups de vigueur appartiennent aux généraux du premier ordre ; eux seuls savent calculer les avantages d’un premier succès comparé aux inconvéniens de l’inaction ; ils connaissent l’effet infaillible de la surprise, osent se confier dans leur génie, et n’hésitent pas de donner quelque chose au hasard.

On voit César commencer presque toutes ses guerres avec peu de troupes, étonner son adversaire et l’éblouir par l’audace de ses entreprises. Remarquons cependant que dans cette opération, qui passe pour la plus téméraire de sa vie, sa prévoyance ne se trouvait pas en défaut, s’il avait rencontré plus de résistance en Italie.

Tandis qu’il faisait cette expédition principale avec trois vieilles légions et vingt-deux cohortes de nouvelles levées, cinq autres légions restées dans les Gaules recevaient l’ordre de marcher, à grandes journées, vers l’Espagne, afin que les lieutenans de Pompée, qui gouvernaient en son nom

ii. 18