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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/38

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CHAPITRE IV.


De La cavalerie légionnaire, et de l’ordre équestre.


Dans le premier dénombrement que fit Romulus des citoyens en état de porter les armes, il s’en trouva trois mille pour former son infanterie, et trois cents qui devaient combattre à pied et à cheval suivant les circonstances.

Ces hommes d’élite se nommèrent d’abord Celeres, du nom de Fabius Celer leur premier commandant, ou peut-être encore, à cause de la promptitude avec laquelle ils exécutaient les ordres du prince. Ils furent appelés depuis flexumines, et ensuite trossuli, de Trossulum, ville de Toscane qu’ils prirent sans le secours de l’infanterie. Enfin ils conservèrent le nom Equites qui caractérise mieux le genre de service dont ils étaient chargés. La république leur fournissait un cheval, et ils étaient distingués par un anneau d’or.

Vous voyez que la proportion de la cavalerie et de l’infanterie fut d’abord d’un à dix. Mais ce rapport diminua par la suite et la cavalerie resta presque toujours fixée au même nombre, bien que l’infanterie augmentât avec les forces de la république.

La cavalerie légionnaire était divisée par turmes ; il y en avait autant que de cohortes : dix dans une légion. Ces turmes n’étaient pourtant pas à la suite des cohortes, mais attachées à la légion en général. Les cohortes se partageaient en trois manipules, et les turmes en trois décuries.

Chaque turme était composée de trente cavaliers : la décurie avait un officier nommé décurion. Celui de la première décurie commandait la turme. Outre ces trois chefs, il y en avait encore trois autres que ces premiers choisissaient, et qui étaient nommés commandans de la queue ; de sorte que chaque turme avait six chefs qui tous obéissaient au premier décurion, et au second en son absence. Ils étaient indépendans des trente cavaliers.

La turme se mettait en bataille sur trois de profondeur et dix de front. On assurait les flancs du premier rang par le second et le troisième décurion ; le premier était devant la turme. Les trois commandans de la queue se plaçaient en serre-files. Il y avait une enseigne par turme.

Jusqu’à la guerre d’Annibal, les Romains n’avaient eu qu’une cavalerie médiocre. Elle se servait d’un bouclier ovale, fait de cuir de bœuf, qui devenait inutile lorsque la pluie l’amollissait. Les épées étaient mauvaises, les lances minces et branlantes, se brisaient facilement. Il paraît au moins singulier que l’infanterie fût cuirassée, tandis que la cavalerie ne l’était pas.

Il est remarquable aussi qu’à cette époque la cavalerie servait plutôt comme une réserve à laquelle on avait recours dans le besoin. À la bataille du Lac Régille, le dictateur Posthumius voyant plier son infanterie, court aux cavaliers qui étaient en arrière, leur fait mettre pied à terre et les mène au combat.

L’usage de faire servir la cavalerie à pied et à cheval, usage dont on ne trouve aucun exemple chez les Grecs, était celui des peuples d’Italie limitrophes de Rome. Le cavalier mettait pied à terre dans la mêlée, et remontait sur son cheval en sautant également de la gauche ou de la droite. Annibal, qui vit faire cette fausse manœuvre aux Romains, à la bataille de Cannes, dit qu’il les aimait autant dans cet état que pieds et poings liés.

La supériorité que les Carthaginois et les Grecs avaient sur les Romains dans cette arme, les obligea d’y faire des