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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/52

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dire non plus que ce savant militaire n’est pas celui qui a jeté le plus de jour sur la science si difficile des combats.

Jomini distingue trois sortes de batailles : les défensives, que livre une armée qui attend dans une position avantageuse. Les batailles offensives, lorsqu’on attaque l’ennemi sur un terrain reconnu ; enfin, les batailles imprévues, ou celles qui s’engagent entre deux partis en marche.

Les préceptes qu’il donne pour les rencontres inattendues, sont précisément ceux que nous ont légués les anciens. Arrêter les avant-gardes et les déployer à droite ou à gauche selon les circonstances, puis réunir le gros des forces sur le point convenable d’après le but que l’on se proposait avant l’attaque. C’est dans ce cas principalement, au milieu du fracas des armes, dit Jomini, qu’il importe d’être bien pénétré du principe fondamental de l’art, et des différentes manières de l’appliquer. Il cite les batailles de Marengo, d’Eylau, d’Abensberg, d’Essling et de Lutzen, comme les plus mémorables parmi celles où les deux partis ont pu agir subitement, sans avoir pu rien prévoir.

Un général qui attend l’ennemi sans autre parti pris que celui de combattre vaillamment, succombera toujours s’il est bien attaqué. Il n’en est pas ainsi de celui qui a formé le projet de passer de la défensive à l’offensive, car il a l’avantage de voir venir l’ennemi, et ses troupes bien disposées d’avance selon le terrain, favorisées aussi par des batteries avantageusement placées, peuvent faire payer chèrement à un adversaire présomptueux le terrain qui sépare les deux armées. Mais il faut un coup-d’œil sûr et beaucoup de sang-froid, pour juger du moment précis où l’on doit ressaisir l’avantage moral que donne toujours l’impulsion offensive ; il devient surtout nécessaire que le général, qui se trouve dans cette situation, commande à des troupes sur lesquelles il puisse compter. Ici encore, Jomini prescrit de ne point négliger, d’appliquer les principes qui auraient présidé à l’ordre de bataille, si l’on avait commencé par être l’agresseur. On peut citer comme des chefs-d’œuvres de défensive-offensive, Rivoli et Austerlitz.

Jomini compte dix espèces d’ordres de bataille offensifs : 1o. l’ordre parallèle simple ; 2o. l’ordre parallèle avec une ou deux ailes débordantes ; 3o. l’ordre oblique sur une aile ; 4o. l’ordre perpendiculaire sur l’extrémité de la ligne ennemie ; 5o. le même ordre sur les deux extrémités ; 6o. l’ordre concave sur le centre ; 7o. l’ordre convexe ; 8o. l’ordre en échelons sur une aile ou sur deux ailes ; 9o. l’ordre échelonné sur le centre ; 10o. enfin l’ordre mêlé d’une attaque sur le centre et sur une extrémité en même temps.

S’il n’y a aucune habileté à faire combattre les deux partis à chances égales, bataillon contre bataillon, il existe néanmoins un cas important, dit Jomini, dans lequel cet ordre devient convenable ; c’est lorsqu’une armée ayant pris l’initiative des grandes opérations stratégiques, aura réussi à se porter sur les communications de son adversaire, et à lui couper sa ligne de retraite, tout en couvrant la sienne. Alors, quand le choc définitif aura lieu entre les armées, celle qui se trouve sur les derrières peut livrer une bataille parallèle, puisqu’ayant terminé la manœuvre décisive avant l’action, il ne lui reste plus qu’à repousser l’effort que fait l’ennemi pour s’ouvrir un passage.

Ce savant tacticien admet encore l’ordre parallèle, dans le cas où l’assaillant