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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/608

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POLYBE, LIV. V.

mille chevaux et de cent deux éléphans.

Ptolémée alla d’abord à Péluse, où il campa en attendant ceux qui le suivaient, et pour distribuer des vivres à son armée. De là passant le mont Casius, et ce qu’on appelle les abîmes, par un pays sec et sans eau, il vint à Gaza, où son armée s’étant reposée, il continua sa route avec la même lenteur qu’il l’avait commencée. Après cinq jours de marche, il arriva à cinquante stades de Raphie, et y campa. Cette ville est après Rhinocorure, la première que l’on rencontre en allant d’Égypte dans la Cœlo-Syrie.

En même temps Antiochus, ayant passé Raphie, vint, de nuit, camper à dix stades des ennemis. Il ne resta pas long-temps dans cet éloignement : quelques jours après, voulant se loger dans les meilleurs postes, et inspirer en même temps de la confiance à ses troupes, il approcha plus de Ptolémée, en sorte que les deux camps n’étaient éloignés l’un de l’autre que de cinq stades. Il y eut alors bien des combats entre les fourrageurs et ceux qui allaient à l’eau ; il y eut aussi entre les deux camps des escarmouches de cavalerie et d’infanterie.

Ce fut aussi alors que Théodote, qui, ayant long-temps vécu avec Ptolémée, connaissait sa manière de vivre, conçut un dessein qui était bien d’un Étolien, mais qui demandait pourtant de la hardiesse et du courage. Il entre, lui troisième, au point du jour, dans le camp des ennemis. Comme il était nuit, on ne le reconnut point au visage, et il n’était pas plus reconnaissable par l’habit, parce qu’il y en avait de toutes manières dans le camp. Il alla droit à la tente du roi, qu’il avait auparavant remarquée pendant les escarmouches qui s’étaient faites tout auprès. Les premiers qu’il rencontra ne prirent pas garde à lui. Il entre dans la tente, cherche dans tous les coins, et manque le roi, qui reposait dans une tente où, pour l’ordinaire, il mangeait et donnait audience. Deux autres officiers et André, le médecin du roi, y dormaient : il les poignarda tous trois et s’en revint impunément au camp, quoique un peu inquiété au sortir des retranchemens ennemis. S’il n’avait fallu que de la hardiesse, il eût réussi ; mais il manqua de prudence en n’examinant pas assez où Ptolémée avait coutume de reposer.

Les deux rois, après avoir été cinq jours en présence, résolurent d’en venir à une bataille décisive. Ptolémée mit le premier son armée en mouvement, et aussitôt Antiochus y mit la sienne. Les phalanges, de part et d’autre, et l’élite des troupes armées à la manière des Macédoniens, furent rangées vis-à-vis l’une de l’autre. Du côté de Ptolémée, Polycrates, avec le corps de cavalerie qu’il commandait, formait l’aile gauche, et entre lui et la phalange était la cavalerie de Crète : suivaient de suite la garde du roi, l’infanterie à rondaches, sous le commandement de Socrates, et les Africains armés à la macédonienne. À l’aile droite Échécrates, à la tête de son corps de cavalerie ; à sa gauche les Gaulois et les Thraces ; puis les mercenaires grecs, Phoxidas à leur tête, auxquels était jointe la phalange égyptienne. Des éléphans, quarante furent mis à l’aile gauche, où Ptolémée devait commander, et trente-trois à l’aile droite, devant la cavalerie étrangère.

Du côté d’Antiochus, soixante éléphans couvraient l’aile droite, où ils devaient combattre contre Ptolémée ; ils étaient conduits par Philippe, frère