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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/613

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POLYBE, LIV. V.

qui ne sont dus qu’aux plus grandes, et qu’en n’accordant à chacun que ce qu’il mérite, elles feront voir que les Grecs, supérieurs aux autres nations, savent donner à chaque chose son juste prix. Reprenons maintenant la guerre des alliés où nous l’avons quittée.




CHAPITRE XIX.


Les Achéens se disposent à la guerre. — Division de Mégalopolis. — Les Éléens battus par Lycus, propréteur des Achéens. — Divers événemens de la guerre des alliés.


Quand l’été fut venu, Agélas étant préteur des Étoliens, et Aratus des Achéens, Lycurgue revint d’Étolie à Lacédémone, rappelé par les éphores, après qu’ils eurent reconnu la fausseté du crime pour lequel il avait été exilé. Pendant que celui-ci prenait des mesures avec Pyrrhias, préteur des Éleéns, pour faire une irruption dans la Messénie, Aratus, ayant fait réflexion qu’il n’y avait plus de troupes mercenaires chez les Achéens, et que les villes ne s’embarrassaient plus d’en lever, depuis qu’Épérate, son prédécesseur dans la préture, avait si fort dérangé les affaires par sa lâcheté et sa mauvaise conduite, il tâcha de relever leur courage, et, en ayant obtenu un décret, il se disposa sérieusement à la guerre. Le décret portait qu’on entretiendrait huit mille fantassins de troupes mercenaires et cinq cents chevaux ; qu’on lèverait dans l’Achaïe trois mille hommes d’infanterie et trois cents chevaux ; que de ce nombre seraient cinq cents fantassins de Mégalopolis, armés de boucliers d’airain, et cinquante chevaux, et autant d’Argiens. Il était, outre cela, ordonné qu’on ferait marcher trois vaisseaux vers Acté et le golfe d’Argos, et trois vers Patres, Dyme et vers ce détroit.

Pendant qu’Aratus faisait ainsi ses préparatifs, Lycurgue et Pyrrhias, étant convenus ensemble de se mettre en même temps en campagne, avancèrent vers la Messénie. Aratus en eut avis, et, à la tête des mercenaires et de quelques troupes d’élite, il vint à Mégalopolis pour secourir les Messéniens. Lycurgue, parti de Sparte, prit par trahison Calamas, château appartenant aux Messéniens, et continua ensuite sa route pour se joindre aux Étoliens. D’un autre côté, Pyrrhias, venant d’Élide avec un fort petit corps de troupes, fut arrêté à l’entrée de la Messénie par les Cyparissiens ; de sorte que Lycurgue, ne pouvant le rejoindre, ni entreprendre, avec son peu de forces, quelque chose par lui-même, se contenta de faire quelque temps du ravage dans le pays, pour subvenir aux besoins de ses troupes, et reprit le chemin de Sparte sans avoir rien fait.

Après ce mauvais succès des ennemis, Aratus, en homme sage et précautionné sur l’avenir, persuada à Taurion et aux Messéniens de fournir chacun cinq cents hommes de pied, et cinquante chevaux pour garder la Messénie, les Mégalopolitains, les Tégéates et les Argiens, tous peuples qui, limitrophes de la Laconie, souffrent les premiers des guerres qu’ont les Lacédémoniens avec les autres peuples du Péloponnèse. Il se chargea lui-même de garder avec des troupes d’Achaïe et des mercenaires, toutes les parties de cette province qui regardent Élée et l’Étolie. Il travailla ensuite à réconcilier entre eux les Mégalopolitains, qui, chassés depuis peu de leur patrie, et ruinés entièrement par Cléomène, quoiqu’ils eussent un besoin pressant de plusieurs choses, ne s’étaient cependant approvisionnés de rien. Toujours même esprit, mêmes dispositions,