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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/639

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POLYBE, LIV. VI.

lerie extraordinaire des alliés, ayant vue sur le marché, le prétoire et le trésor. Un chemin ou une rue large de cinquante pieds, partage en deux le terrain de la cavalerie extraordinaire, descendant à angle droit depuis le côté qui ferme le derrière du camp jusqu’à l’espace dont nous parlions tout à l’heure, et au terrain qu’occupe le prétoire. Enfin, derrière la cavalerie extraordinaire des alliés campe leur infanterie extraordinaire, tournée du côté du retranchement et des derrières du camp. Ce qui reste d’espace vide des deux côtés, est destiné aux étrangers et aux alliés qui viennent au camp pour quelque occasion que ce soit. Toutes choses ainsi rangées, on voit que le camp forme une figure carrée, et que, tant par le partage des terres que par la disposition du reste, il ressemble beaucoup à une ville.

Du retranchement aux tentes il y a deux cents pieds de distance, et ce vide leur est d’un très-grand usage, soit pour l’entrée, soit pour la sortie des légions ; car chaque corps s’avance dans cet espace par la rue qu’il a devant lui, et les troupes, ne marchant point par le même chemin, ne courent pas risque de se renverser et de se fouler aux pieds. De plus, on met là les bestiaux et tout ce qui se prend sur l’ennemi, et on y monte la garde pendant la nuit. Un autre avantage considérable, c’est que, dans les attaques de nuit, il n’y a ni feu ni trait qui puisse être jeté jusqu’à eux, ou si cela arrive, ce n’est que très-rarement ; et encore, qu’en peuvent-ils souffrir, étant à une si grande distance et à couvert sous leurs tentes ?

Après le détail que nous avons donné du nombre des fantassins et des chevaux dans chaque légion, soit qu’elles soient de quatre ou de cinq mille hommes ; de la hauteur, longueur et largeur des turmes et des manipules ; de l’intervalle qu’on laisse pour les rues et pour les places, il est aisé de concevoir l’étendue du terrain qu’occupe une armée romaine, et par conséquent toute la circonférence du camp.

Si, dès l’entrée de la campagne, il s’assemble un plus grand nombre d’alliés qu’à l’ordinaire, ou que, pour quelque raison, il en vienne de nouveaux pendant son cours, outre le terrain que nous avions marqué, on fait un logement à ceux-ci dans le voisinage du prétoire, dût-on pour cela, s’il était nécessaire, ne se servir que d’une place pour le marché et le trésor. À l’égard de ceux qui ont joint d’abord l’armée romaine, des deux côtés du camp, on leur fait une rue pour les loger à la suite des légions.

S’il arrive que quatre légions et deux consuls se rencontrent au dedans du même retranchement, pour comprendre la manière dont ils sont campés, il ne faut que s’imaginer deux armées tournées l’une vers l’autre, et jointes par les côtés où les extraordinaires de l’une et de l’autre armée sont placés, c’est-à-dire par la queue du camp : et alors le camp fait un carré long, qui occupe un terrain double du premier, et qui a une fois et demie plus de tour. Telle est la manière de se camper des consuls lorsqu’ils se joignent ensemble : mais quand ils campent séparément, toute la différence qu’il y a, c’est que le marché, le trésor et les tentes des consuls se mettent entre les deux camps.

Le camp ainsi disposé, les tribuns assemblés reçoivent le serment de tout ce qu’il y a d’hommes dans chaque légion, tant libres qu’esclaves. Tous jurent l’un après l’autre, et le serment qu’ils font consiste à promettre qu’ils ne voleront rien dans le camp, et que