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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/695

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POLYBE, LIV. IX.

les deux points équinoxiaux. C’est le seul moyen de prendre une mesure de temps proportionnée au chemin que l’on a à faire, ou par terre ou par mer. Il est encore nécessaire de connaître les différentes parties du jour et de la nuit, afin de savoir à quelle heure on doit se lever, à quelle heure on doit marcher ; car, sans avoir bien commencé, il n’est pas possible de finir heureusement.

Les heures du jour se connaissent par l’ombre, par le chemin que fait le soleil, par différens espaces de ce chemin que l’on marque sur la terre. Celles de la nuit ne sont pas aisées à connaître, à moins que, par l’inspection du ciel, on ne sache juger de la disposition des douze signes, ce qui est très-facile pour ceux qui ont étudié la science des phénomènes célestes. En effet, bien que les nuits soient inégales, il n’y en a cependant point où il ne paraisse six des signes du zodiaque sur l’horizon, et par conséquent il faut qu’aux mêmes parties de la nuit il paraisse des parties égales des douze signes. Quand donc on sait quelle partie du zodiaque le soleil occupe pendant le jour, on n’a, lorsqu’il est couché, qu’à couper le cercle en deux parties égales, et alors autant le zodiaque sera élevé sur l’horizon, autant il se sera passé de la nuit. Le nombre et la grandeur des signes étant connus, on connaîtra en même temps les différens temps de la nuit. Pendant les nuits où le temps est couvert, il faut faire attention à la lune. Cet astre est si grand qu’en quelque endroit du ciel qu’il soit, on en aperçoit la lumière. Quelquefois c’est du temps et du lieu de son lever, d’autres fois c’est du temps et du lieu de son coucher que l’on doit conjecturer les différentes heures de la nuit : toutes choses qui supposent que l’on connaît parfaitement toutes les différences qui arrivent au lever de la lune. Au reste cette étude est facile. Elle ne demande pas plus de temps que n’en met la lune pour achever son cours ; et comme il ne faut que des yeux pour examiner son cours, tout le monde en est également capable. C’est donc avec raison, qu’Homère nous représente Ulysse, ce grand capitaine, conjecturant par les astres non-seulement ce qui concerne la navigation, mais encore ce qui se doit faire sur terre ; car on peut prévoir exactement par ce moyen les événemens les plus extraordinaires, et les plus capables de jeter souvent dans de très-grands embarras, comme les inondations, les débordemens de fleuves, les gelées extrêmes, les chutes de neige, les nuées sombres et épaisses, et autres accidens semblables. Si nous manquons de prévoir les choses mêmes qui peuvent être prévues, ne serons-nous pas coupables des mauvais succès de la plupart de nos entreprises ? C’est pourquoi rien de ce que nous venons de remarquer ne doit être négligé, de peur de tomber dans les fautes où tant d’autres sont tombés. Citons-en quelques-unes pour servir d’exemples.

Aratus général des Achéens, ayant formé le dessein de prendre par surprise la ville de Cynèthe, convint avec ceux des citoyens qui étaient d’intelligence avec lui, qu’un certain jour il viendrait pendant la nuit près du fleuve Cynèthe qui descend de la ville, et resterait là pendant quelque temps avec son armée ; qu’au dedans de la ville les conjurés prendraient leur temps vers le milieu du jour pour faire sortir sans bruit un des leurs en manteau. Celui-ci devait avertir Aratus d’approcher plus près, et de se poster sur un certain tombeau qui lui avait été désigné en face de la ville. Les autres de-