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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/82

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et de l’autre, sur la déposition formelle et unanime des historiens du siècle suivant.

Le mot de Pausanias ne les contredit point. Les successeurs d’Alexandre avaient fait connaître ces contrées à plusieurs bandes de Gaulois, et les prenaient à leur solde avant cette époque ; mais jamais des Gaulois libres, indépendans, n’avaient traversé la mer dans le dessein de s’établir en Asie, avant le fameux passage de Leonorius.

Éphèse, si l’on n’élève sur cet événement aucun doute, n’a été prise que par un corps de Gaulois à la solde des successeurs d’Alexandre, ou par les Galates établis en Asie. Leurs courses étaient si fréquentes, leurs irruptions si momentanées, que les écrivains ont pu négliger cette surprise, ce pillage d’un jour ou de quelques heures ; il eût été tout autrement remarquable sous le règne d’Alexandre le Grand.

Une seconde inadvertance des historiens est d’avoir érigé en tribut les subsides que les rois successeurs de ce prince payaient à ces barbares, pour en obtenir des troupes et des services. C’est comme si l’on disait que Louis XIV fut tributaire des Suisses, des Anglais et des Suédois, parce qu’il engagea ces peuples, par d’assez fortes sommes, à servir ses desseins.

Les capitaines d’Alexandre célébraient ses obsèques en déchirant son empire ; plusieurs royaumes s’élevaient sur ces débris. Beaucoup de villes voisines de la Propontide ou de l’Hellespont s’étaient érigées en république. La jalousie et la faiblesse de tant d’États ennemis les uns des autres, firent la force des Galates établis au milieu d’eux. Il paraît que cette situation délicate fut comprise, puisqu’ils protégèrent constamment ces faibles républiques contre la puissance des rois qui cherchaient à les envahir.

Ils adoptèrent les Dieux des pays où ils habitaient ; du moins les Grecs comptent leurs propres divinités au nombre de celles des Galates. Ce sont les Grecs qui nous ont appris les premiers que ces barbares immolaient des victimes humaines ; les premiers aussi ils nous ont enseigné leur manière de combattre et de se régir.

Ainsi, c’est du fond de l’Asie-Mineure que nous sont venues les premières notions que nous avons recueillies sur la religion et le gouvernement de nos ancêtres. Les Romains, occupés de la guerre et de leur propre grandeur, ne songeaient aux Gaulois que pour les vaincre ; leur premier historien, Fabius Pictor, n’avait point encore écrit.

On ignore les proportions qu’établissaient les Galates entre l’infanterie et la cavalerie, et la manière dont ils combinaient ces deux corps sur un champ de bataille ; à moins qu’on ne leur attribue par extension une méthode en usage chez d’autres Gaulois orientaux leurs contemporains. Elle consiste en ce que les fantassins, mêlés alternativement avec les cavaliers, combattaient de concert, et couraient de la même vitesse ; puis à mesure que la perte des cavaliers laissait des chevaux libres, les fantassins s’élançaient dessus. Les Germains, du temps de César, pratiquaient une manœuvre assez semblable.

On voit du reste que les Gaulois estimaient leur cavalerie avant l’infanterie, et qu’elle valait beaucoup mieux. En effet tous les peuples barbares ou demi-barbares, qui ne combattent que pour piller, ont toujours excellé en cavalerie. Dans le fond, il est égal que le mélange dont nous venons de parler appartienne aux Gaulois de l’Asie ou à ceux d’Illyrie ; mais nous possédons des notions plus positives sur la cavalerie des Galates.