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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/821

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POLYBE, LIV. XVI.

vigueur qu’il sauve son vaisseau, aidé par Philostrate, qui était venu fort à propos à son secours. De là il va joindre le reste de la flotte, entre de nouveau dans l’action, se met aux prises avec les Macédoniens ; sans force et sans vigueur, à la vérité, parce qu’il perdait tout son sang par ses blessures, mais avec plus de courage, plus de présence d’esprit, et par conséquent plus de gloire que dans tout le reste du combat. Au reste, il se donna dans cette journée deux batailles navales à quelque distance l’une de l’autre ; car l’aile droite de Philippe, qui n’avait pas quitté la côte qu’elle avait rasée d’abord, n’était pas loin de l’Asie ; et la gauche, qui s’était tournée pour secourir l’arrière-garde, était aux mains avec les Rhodiens assez près de Chio.

Attalus vainqueur à son aile droite, s’approchait des petites îles où Philippe, à l’ancre, attendait quel serait le succès de la bataille. Chemin faisant, il aperçoit une de ses quinquérèmes, qui, mise hors de combat, avait été ouverte, et que les Macédoniens tâchaient de submerger. Il court pour la tirer de ce danger avec deux quatrirèmes. Le vaisseau ennemi abandonne sa proie et se retire vers la terre. Attalus le suit vivement pour s’en rendre maître. Philippe, qui le voit éloigné du reste de sa flotte, prend quatre quinquérèmes, trois galiotes et ce qu’il y avait d’esquifs auprès de lui ; il se poste entre Attalus et ses vaisseaux pour lui couper le retour, et l’oblige à se jeter sur la côte, tout tremblant encore du danger auquel il avait échappé. Attalus se retira dans Érythrée avec ce qu’il avait de troupes, et laissa Philippe se saisir des vaisseaux qui l’accompagnaient et de tout le bagage royal qu’ils portaient. Ce n’était pas sans dessein que le roi de Pergame avait étalé tout ce qu’il avait de riche et de magnifique sur le tillac de son vaisseau, et les Macédoniens donnèrent dans le piége qu’il leur tendait par cet étalage ; car les premiers qui le joignirent voyant une grande quantité de vases précieux, un habit de pourpre et les autres meubles dont ceux-là sont ordinairement accompagnés, cessèrent de poursuivre, se mirent à piller, et laissèrent Attalus se retirer tranquillement à Érythrée.

Philippe, quoique vaincu, fit beaucoup valoir ce petit avantage. Il se mit en haute mer, rassembla ses vaisseaux, et releva le courage de ses troupes en les flattant qu’elles avaient remporté la victoire. Quelques-uns, en effet, furent portés à le croire en voyant ce prince traîner après lui le vaisseau même d’Attalus. À la vue de ce vaisseau Dionysidore conjectura ce qui était arrivé au roi son maître. Il leva un signal, rappela autour de lui ses galères, et se retira sans courir aucun risque dans les ports de l’Asie. En même temps ceux des Macédoniens qui étaient aux mains avec les Rhodiens, et qui en étaient maltraités, se retirèrent du combat les uns après les autres, sous prétexte d’aller au plus vite au secours de leurs vaisseaux. Pour les Rhodiens, après avoir lié à leurs galères une partie de celles qu’ils avaient prises, et coulé à fond les autres, ils s’en allèrent à Chio.

Du côté de Philippe il périt dans le combat contre Attalus une galère à dix, une à neuf, une à sept, et une à six rangs de rames, dix autres vaisseaux pontés, et quarante vaisseaux légers, à quoi il faut ajouter deux quatrirèmes et sept petits bâtimens qui furent pris. La perte d’Attalus fut d’une galiote et de deux quinquérèmes qui furent coulées à fond, et du vaisseau même qu’il montait. À l’égard des Rhodiens, ils perdirent deux quinqué-