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Page:Lissagaray - Les huit journees de mai, Petit Journal Bruxelles, 1871.djvu/110

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colonnes versaillaises débouchant sur la place du Château-d’Eau.

La chaleur était suffocante. Assis ou couchés à l’ombre des barricades, les hommes de ces quartiers causaient en attendant l’attaque. On ignorait en général l’ensemble des événements ; beaucoup s’étonnaient du silence de Montmartre. Ailleurs, on crut jusqu’au dernier moment — nous savons par quel stratagème — que la forteresse luttait toujours, ou bien allait être reconquise. On ne recevait ni renseignements, ni ordres, et les balles seules annonçaient le voisinage ou la présence de l’ennemi. Les obus du Père-Lachaise sifflaient sur la tête des fédérés, allant s’abattre sur les quartiers du centre. Parfois un passant ou deux traversaient, on courant, les rues et les boulevards éclatants de soleil, silencieux et déserts. Là, comme dans tous les quartiers de Paris où l’on se battait, la vie semblait suspendue en plein jour comme par une sorte d’enchantement.

Les barricades de la porte Saint-Denis et Saint-Martin tombèrent vers la fin du jour. Les soldats s’étaient emparés, peu à peu, des maisons latérales, et s’avançant sur les toits, ils purent, à six heures du soir, dominer les fédérés. On raconte que, à cet endroit, un lignard re-