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Page:Locke - Du gouvernement civil, 1795.djvu/262

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Du Gouvernement Civil,

peuple ne seroit point une société de créatures raisonnables, qui composassent un corps pour leur mutuel avantage, et qui eussent des conducteurs établis sur elles pour être attentifs à procurer leur plus grand bien ; mais plutôt un troupeau de créatures inférieures, sous la domination d’un maître qui les feroit travailler, et emploieroit leur travail pour son plaisir et pour son profit particulier. Si les hommes étoient assez destitués de raison et assez abrutis pour entrer dans une société sous de telles conditions, la prérogative, entre les mains de qui que ce fût qu’elle se trouvât, pourroit être un pouvoir arbitraire et un droit de faire des choses préjudiciables au peuple.

VI. Mais puisqu’on ne peut supposer qu’une créature raisonnable, lorsqu’elle est libre, se soumette à un autre, pour son propre désavantage (quoique si l’on rencontre quelque bon et sage conducteur, on ne pense peut-être pas qu’il soit nécessaire ou utile de limiter en toutes choses son pouvoir), la prérogative ne sauroit être fondée que sur la permission que le peuple a donnée à ceux à qui il a remis le gouvernement, de faire diverses choses, de leur propre et libre choix, quand les loix ne prescrivent rien [sur]