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Page:Locke - Du gouvernement civil, 1795.djvu/316

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Du Gouvernement Civil,

prétexte à la force, laquelle on n’a droit d’employer que quand on est empêché d’appeler aux loix ; et rien ne doit être regardé comme une violence et une hostilité, que ce qui ne permet pas un tel appel. C’est cela précisément qui met dans l’état de guerre celui qui empêche d’appeler aux loix ; et c’est ce qui rend aussi justes et légitimes les actions de ceux qui lui résistent. Un homme, l’épée à la main, me demande la bourse sur un grand chemin, dans le tems que je n’ai peut-être pas un sol dans ma bourse, je puis, sans doute, légitimement tuer un tel homme. Je remets entre les mains d’un autre, cent livres, afin qu’il me les garde, tandis que je mets pied à terre. Quand ensuite je les lui redemande, il refuse de me les rendre, et met l’épée à la main pour défendre, par la force, ce dont il est en possession, et que je tâche de recouvrer. Le préjudice que ce dernier me cause, est cent fois, ou peut-être mille fois plus grand que celui qui a eu dessein de me causer le premier, c’est-à-dire, ce voleur que j’ai tué avant qu’il m’eût fait aucun mal réel. Cependant, je puis, avec justice, tuer l’un, et je ne saurois légitimement blesser l’autre. La raison de cela est palpable, c’est que