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Page:Locke - Du gouvernement civil, 1795.djvu/83

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par M. Locke.

les autres : et quand d’une chose on en laisse beaucoup plus que n’en ont besoin les antres, il leur doit être fort indifférent, qu’on s’en soit pourvu, ou qu’on ne l’ait pas fait. Qui, je vous prie, s’imaginera qu’un autre lui fait tort en buvant, même à grands traits, de l’eau d’une grande et belle rivière, qui, subsistant toujours toute entière, contient et présente infiniment plus d’eau qu’il ne lui en faut pour étancher sa soif ? Or, le cas est ici le même, et ce qui est vrai à l’égard de l’eau d’un fleuve, l’est aussi à l’égard de la terre.

X. Dieu a donné la terre aux hommes en commun : mais, puisqu’il la leur a aussi donnée pour les plus grands avantages, et pour les plus grandes commodités de la vie qu’ils en puissent retirer, on ne sauroit supposer et croire qu’il entend que la terre demeure toujours commune et sans culture. Il l’a donnée pour l’usage des hommes industrieux, laborieux, raisonnables ; non pour être l’objet et la matière de la fantaisie ou de l’avarice des querelleurs, des chicaneurs. Celui à qui on a laissé autant de bonne terre qu’il en peut cultiver et qu’il s’en est déjà approprié, n’a nul sujet de se plaindre ; et il ne doit point trou-