Aller au contenu

Page:Londres - L’Âme qui vibre, 1908.djvu/180

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
170
L’ÂME QUI VIBRE


Nous ne trouverons pas la trace d’un bonheur.
Alors, qu’avons-nous bien laissé sur la hauteur ?

Nous y avons laissé, dans un vent de détresse,
D’abord, vous, votre mère, et puis moi, ma maîtresse,
Si bien que, de nous deux, on peut voir maintenant
Votre doux fils sans femme et sa « mé » sans maman.
Ne nous étonnons plus, alors, si, dans la vie
Nous allons au hasard de la pente suivie.
Nous sommes de ceux-là dont tout est mort en eux ;
La croyance à la terre et la croyance aux cieux ;
De ceux-là qui s’en vont, les boulets aux chevilles,
Sur la route ou la mort leur ouvrira ses grilles.

Qu’avons-nous bien laissé sur la hauteur encor ?
(Si je fais avec vous le tour de notre sort,
C’est qu’à deux le chemin paraîtra moins pénible).
Qu’avons-nous donc laissé sur ce sommet terrible ?

Nous y avons laissé, dans notre désarroi,
Nos cœurs hurlant ainsi que des chiens aux abois.
Nos cœurs martyrisés et nos âmes errantes,
Veuves cherchant en vain leurs deux pauvres parentes
Et, pour bien leur marquer notre fidélité,
Moi, ma jeunesse entière, et vous, votre santé.