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Page:Londres - L’Âme qui vibre, 1908.djvu/80

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L’ÂME QUI VIBRE


— Poète, souviens-toi de ce que je t’ai dit :
Si tu vas musardant par îa route, sans cesse,
Le sommeil poussera chaque être vers son lit,
Et tu ne verras point, ce soir, ta belle hôtesse.

— C’est vrai, mon âme, oh ! oui, c’est vrai, mais cependant,
Puis-je passer ici sans admirer ce site ?
Puis-je passer ici, moi, raisonnablement,
Sans entendre le cœur de la nuit qui palpite ?

— Mon poète, après tout, tu peux bien écouter
Tous les cœurs de la nuit, du jour ou d’autre chose.
Je ne t’offrirai plus mes yeux pour te guider,
Je ne vois pas pourquoi je soutiendrais ta cause.

— Tu parles bien, mon âme, et d’après la raison.
Laisse-moi donc aller selon ma fantaisie,
Laisse-moi contempler l’espace à ma façon,
Laisse-moi boire seul au bol de poésie.

Tiens ! regarde avec moi, là-bas, dans le brouillard,
Tous ces arbres qui sont courbés comme un vieillard.
Tous ces arbres, si loin qu’ils n’en ont plus de teinte,
Sont calmes comme l’âme auguste d’une sainte.