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convoi d’un nègre ibos qui m’a semblé d’une bizarrerie bien étrange.

Ce nègre était cuisinier chez son maître. Tous ses compatriotes suivaient tristement le corps. L’un portait une marmite, l’autre un canari ; celui-ci tenait à la main un long couteau, celui-là avait devant lui un tablier tout plein de sang ; chacun portait enfin quelque ustensile de cuisine. Au milieu de la foule était un vieux nègre qui menait lentement un jeune cabri, et semblait commander à tous les autres ; c’était vraisemblablement le maître de cérémonies.

Le cortège arrive à la porte de l’église. Le curé, qui était là pour recevoir le corps (car il n’accompagne dans les rues que le corps des blancs), le curé, dis-je, interdit, bien entendu, l’entrée du temple à cette sorte de mascarade. Tous attendent que la cérémonie religieuse soit finie, puis se dirigent, dans le même ordre, vers le cimetière. Ils déposent le corps dans la tombe en récitant quelques prières, l’arrosent du sang du cabri qu’ils égorgent tout auprès, et dont ils mettent la tête sur le cercueil. Après avoir comblé la fosse, ils récitent encore des prières et se retirent en silence.