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Page:Lope de Vega - Théâtre traduction Damas-Hinard tome 1.djvu/92

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La Duchesse.

Ah ! prince !

L’Infant.

Pourquoi feindre la surprise ?

La Duchesse.

Je sais que je ne puis rien vous prouver à cet égard, mais je puis cependant vous répondre… Ne faudrait-il pas que le comte fût doué par le ciel d’une manière miraculeuse, pour se faire distinguer d’un cœur auquel vous prétendez ?… Oh ! vraiment, voilà un galant bien redoutable, un aimable cavalier, un beau Narcisse !… Allez, c’est une impertinence à vous que d’être jaloux d’un fou comme lui.

L’Infant.

Le comte n’est pas si fou que vous le dites, Celia ; il le serait seulement si, moi, dédaigné, je lui inspirais la jalousie qu’il m’inspire.

La Duchesse.

N’était-il pas ici avec vous, le comte ?

L’Infant.

Quand ?

La Duchesse.

Tout à l’heure.

L’Infant.

Mais… non.

La Duchesse.

Ah ! seigneur !

L’Infant.

Non, madame, croyez-moi. Du moins je ne l’ai pas vu. Il peut se faire qu’il ait rôdé autour de votre jardin, selon son habitude, mais il ne s’est pas présenté à votre porte où j’étais. Toutefois, il m’est revenu une nouvelle qui me donne l’espoir que vous serez moins cruelle envers moi à l’avenir. — Votre comte est parti.

La Duchesse.

Le comte ?

L’Infant.

Sans doute.

La Duchesse.

Et… où s’en est-il allé ?

L’Infant.

Loin d’ici.

La Duchesse, à part.

Hélas !

L’Infant.

Je vous recommande le secret.

La Duchesse.

Soyez assuré que je ne le trahirai pas. (À part.) Je le garderai au fond de l’âme, en demandant au ciel de ramener le comte. (Haut.) Er savez-vous s’il reviendra ?