Aller au contenu

Page:Lope de Vega - Théâtre traduction Damas-Hinard tome 2.djvu/232

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

je ne saurais écouter aucun conseil. — J’ai cependant suivi le tien… J’ai fait appeler son frère.

Don Arias.

C’est bien fait.

Henri.

Ou la chose sera impossible, ou je trouverai quelque moyen d’entrer dans la maison de cet ange.

Don Arias.

Il n’a que les yeux d’or. Couvrez-le d’or de la tête aux pieds, et vos affaires n’iront pas mal.


Entrent DON FÉLIX et un Domestique.
Le Domestique.

Seigneur, voici don Félix, frère de Dorothée.

Henri.

Qu’il soit le bienvenu… Approchez, soyez sans crainte.

Don Félix.

Il est tout naturel qu’on soit intimidé en présence d’un si haut et si généreux prince… surtout moi, qui m’étonne et me demande comment pourrait vous être utile un homme aussi obscur.

Henri.

On m’a dit, don Félix, que vous êtes l’homme de Séville qui se connaît le mieux en chevaux ; que vous en avez un de Cordoue qui n’a pas son égal. Je voudrais l’acheter, d’abord ; et ensuite que vous m’en trouvassiez encore huit ou dix de votre choix, pour les emmener en Castille.

Don Félix.

Il faut, seigneur, qu’il y ait à Séville quelque autre don Félix. Pour moi je n’ai point de chevaux, et je n’y entends absolument rien. Ma famille est pauvre, très-pauvre. Mes parents, à leur mort, ne m’ont rien laissé qu’une sœur, assez belle, qui s’élève sous les auspices d’une de ses tantes, d’une manière honorable mais fort modeste. Il doit y avoir à Séville un autre cavalier de mon nom à qui appartienne ce beau cheval que vous dites. Moi, je n’ai que ma sœur, et un petit nombre de livres qui me tiennent lieu de chevaux, de jardins, de palais, et qui font tout mon plaisir comme toute ma richesse.

Henri.

On se sera trompé à cause du nom. — Mais puisque l’on vous a dérangé, votre bonne mine et votre esprit m’inspirent le désir de vous prendre à mon service. — Votre sœur est-elle mariée ?

Don Félix.

Non, seigneur. Si elle l’était, elle ne serait pas sous la protection que je vous ai dite. Elle est demoiselle, elle a de l’esprit et de la vertu, et ce qu’il y a de moins louable en elle, c’est sa beauté.

Henri.

Pourquoi ne la mariez-vous pas ?