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Page:Lorrain, Jean - Sonyeuse, 1891.djvu/121

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fuse mêlée aux autres rumeurs du crépuscule et de la solitude, une même pensée triste semblait avoir étreint au cœur toute cette brillante et joyeuse compagnie, car toutes les conversations s’étaient tues et chacun, l’oreille au guet, semblait épier encore la ritournelle, hélas ! éteinte aux lèvres du chanteur, pauvre hère disparu peut-être et sans retour au coude du chemin.

La belle madame Engrand, une veuve divorcée, fut la première à rompre ce silence. « Bah, faisait-elle en appuyant la cambrure de sa taille ronde à l’osier tressé de son rocking-chair, tout cela, c’est de la romance… les hommes d’aujourd’hui sont plus pratiques ; on ne meurt plus d’amour. »

« Vous croyez ? » C’était la voix moqueuse et nette de notre hôte, sir Williams Willins, arrivé sur la pointe du pied nous rejoindre et, très grave, s’étant installé près de nous. « On n’en meurt pas, mais on en devient très bien fou ! »

« Une histoire ! » ripostait railleusement la belle Mme Engrand, son profil impertinent de mondaine millionnaire tourné à demi vers son interlocuteur !