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Page:Lorrain, Jean - Sonyeuse, 1891.djvu/19

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de sa redingote, mettant à chaque bond le rose de ses jambes nues dans le vert des grandes herbes et dans l’air le brusque envolement d’une nappe de cheveux blonds.

— Ce sont des Anglais, résumait dans sa sagesse de paysanne ma bonne Héloïse, une opinion basée sur les jambes nues et les tresses portées en liberté, dénouées sur les épaules, de l’enfant.

Ce fut tout ce jour-là.

Le soir, à table (dans la vie de province il n’y a pas de petit fait et tout ce qui n’y est pas ordinaire et prévu y prend les proportions d’un événement) je ne manquai pas de parler de ma rencontre.

— Des étrangers dans Sonyeuse, pensait mon père à voix haute, Bricard se serait alors laissé graisser la patte, voilà qui m’étonnerait un peu et me gâterait mon vieux Bricard ! et puis se ravisant et s’adressant à ma mère occupée à servir le potage : « Ne serait-ce pas les Anglais du Grand-Cerf ? »

Il y avait donc des Anglais au Grand-Cerf ? Le Grand-Cerf était alors la première hôtellerie de la ville. Qu’étaient ces Anglais que je ne connais-