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Page:Lorrain, Jean - Sonyeuse, 1891.djvu/259

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immense tristesse moderne, et essentiellement moderne, ce folâtre est un penseur, ce grivois un souffrant, un apitoyé à la sensibilité douloureuse et vibrante, un obsédé, lui aussi, du spectre de la Grande Camarde, un terrorisé à genoux devant la mort.

Épouvante et terreur qui du peintre galant font un peintre macabre. Fouillez plutôt son œuvre, examinez ses fresques, feuilletez ses dessins. Les ailes de ses moulins, grands détrousseurs de jupes, ont des bras de squelettes ; des murs de cimetières bornent ses paysages ; les blouses de ses pierrots ont des plis de suaire ; ses cabarets d’amour recèlent des croque-morts ; ses joyeux champs de blés, épis et coquelicots, où d’enragés bretteurs pillent à bouche-que-veux-tu des nudités cabrées de sveltes jolies filles, dressent, pour effaroucher les oisillons rôdeurs, d’équivoques mannequins à silhouettes de spectre et, je l’ai déjà écrit tout à l’heure, à travers les lunes énormes, fantomatiques et blêmes, dont il aime à trouer ses grands ciels en grisailles, grimace et transparaît une tête de mort.