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Page:Lorrain, Jean - Sonyeuse, 1891.djvu/75

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cette grille, d’énormes couronnes de verdure et de mousse pourrissaient. Ces couronnes ne devaient pas avoir plus d’un mois, car des moisissures, qui avaient dû être des fleurs naturelles, s’y écrasaient entre de larges nœuds de moire mauve et de crêpe ; l’une de ces couronnes éventrée avait laissé couler sur la pierre une trainée de détritus, camélias et bouquets de violettes flétris.

Du bout de son ombrelle ma mère écartait ces vieux lambeaux d’offrande et l’épitaphe apparaissait :

CI-GIT HÉLÈNE
Née en janvier 1812 à Édimbourg, Écosse
morte en avril 1840 à S…, France

Et c’était tout.

— Lady Mordaunt, me disait alors lentement, solennellement, ma mère, le bout de son ombrelle toujours appuyé sur le ci-git Hélène, ou plutôt celle qui s’appelait ici lady Mordaunt… Elle n’avait pas trente ans ! »

J’étais resté stupéfait avec au coin des yeux l’humidité montante de grosses larmes : mes pressentiments ne m’avaient donc pas trompé, ces pressentiments dont avaient voulu se jouer les