Page:Loti - L’Horreur allemande, 1918.djvu/163

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fois encore, aux conséquences des grands « progrès » humains.

Un seul autel de la basilique est resté visible comme jadis ; c’est dans une aile de gauche, celui de la Notre-Dame des Victoires ; celui-là, quand on a voulu l’enfouir sous les matelas gris, toute la population s’y est opposée, disant que cela attirerait le malheur. Elle continue donc de se laisser regarder ; la statue de la Notre-Dame ; toute petite, archaïque, en or fin, elle continue de paraître et de luire, au milieu d’ex-voto en pierreries qui jettent leurs feux à la lueur des cierges ou des pieuses lampes. Et beaucoup de femmes en voiles de deuil sont prosternées devant elle, des mères, des épouses, des sœurs ; elles prient pour qu’au moins la victoire vienne venger leurs bien-aimés qui sont morts… On ose à peine s’approcher, même sur la pointe des pieds, de peur de troubler leurs extases…


C’est ma seconde et dernière soirée à Venise, que je ne reverrai sans doute jamais plus. Je repars demain matin pour la France, pour l’armée du Nord, où je conterai à mes com-