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Page:Loti - L’Horreur allemande, 1918.djvu/33

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premier étage d’une maison, au-dessus de cassons informes, une image de première communion sous verre, qui tient encore, intacte, à son clou, et regarde les passants par l’ouverture béante de la façade. Ailleurs, dans ce qui reste d’une chambre tapissée de papier bleu, une toute petite robe blanche à dentelles s’est accrochée à une poutre, les manches pendantes, comme la tête en bas : la belle robe de quelque gentille fillette d’ouvriers, pour ses promenades du dimanche… Et toujours, et toujours, on a beau s’éloigner, retourner, changer de direction, on ne change pas d’ambiance ; la destruction farouche n’a rien oublié. À leur retour, ceux des exilés qui ne seront pas morts en esclavage ne doivent plus espérer trouver chez eux rien de ce qu’ils chérissaient ; c’est ce chaos qui les attend, et il faut plutôt leur souhaiter de ne jamais revenir, de ne jamais revoir. Tout est irréparable ; avant même de songer à réédifier, il y aura urgence d’achever d’abattre.

Est-ce possible, tant de travail humain, qui représentait l’apport de quelques siècles, stupidement anéanti en deux ou trois jours !